La Russie en colère contre l'apparition de navires de guerre de l'OTAN en mer Noire
Toute révision de la Convention de Montreux ou son remplacement par un autre traité plus conforme à l’actuel renforcerait certainement la position de la Turquie.
Les Russes sont irrités par la présence croissante de navires de guerre de l'OTAN en mer Noire et en particulier dans les ports ukrainiens, y voyant un défi à la puissance et à l'influence de la Russie dans la région.
Moscou craint également que les États-Unis ne s'apprêtent à nier la Convention de Montreux signée en 1936, qui contrôle le passage des navires militaires dans les détroits turcs, afin de créer une base permettant aux marines occidentales d'accroître leur présence en mer Noire.
La présence navale de l'OTAN en mer Noire s'intensifie. Photo : Twitter. |
La Russie se demande alors si elle doit chercher à modifier ce traité vieux de plus de 80 ans pour contrer l'OTAN. Nombreux sont ceux qui estiment que la Convention de Montreux et le soutien de la Turquie ont garanti les intérêts russes en mer Noire.
La Convention de Montreux régit formellement les détroits turcs. Elle oblige la Turquie à autoriser le libre passage des navires de commerce, sauf en cas de guerre ou de menace extérieure ; elle impose également d'importantes restrictions aux navires de guerre des pays non riverains de la mer Noire, même en temps de paix.
Selon la Convention, aucun pays ne peut entrer en mer Noire avec plus de neuf navires de guerre d'une jauge brute maximale de 15 000 tonneaux ; et aucun groupe d'États côtiers extérieurs à la région ne peut entrer en mer Noire avec un navire de guerre de plus de 45 000 tonneaux. Ces navires ne sont pas autorisés à naviguer en mer Noire plus de 21 jours.
Depuis lors, tous les partis, à l'exception de la Turquie, ont exprimé leur intérêt pour une révision de la Convention de Montreux à un moment ou à un autre. Aujourd'hui, face à la présence de plus en plus fréquente de navires de l'OTAN, un nombre croissant de responsables politiques et d'experts russes plaident pour une révision de la Convention avant que l'Occident ne la modifie en leur faveur.
De nombreux Russes estiment que, pour garantir les intérêts de la Russie en mer Noire, la période d'opération des navires de guerre doit être encore raccourcie, car la présence d'un trop grand nombre de navires de guerre en mer Noire constituera une menace constante pour la sécurité de la Russie en général et de la Crimée en particulier.
La Turquie joue un rôle clé dans les questions liées à la Convention de Montreux. Photo : CSIS |
Mikhaïl Alexandrov, analyste militaire russe de l'Institut des relations internationales de Moscou (MGIMO) du ministère des Affaires étrangères, a affirmé que le renforcement militaire de l'OTAN en mer Noire mettait en péril l'avenir de la Convention de Montreux. Il a suggéré que Moscou réponde au défi lancé par les navires de l'OTAN en demandant des amendements à la convention. Mais malgré les appels des parlementaires de Crimée à modifier les termes de la Convention de Montreux, Alexandre a déclaré que Moscou ne devrait prendre aucune mesure en ce sens sans le soutien de la Turquie.
L'Occident a toujours prétendu apprécier la position de la Turquie et respecter sa souveraineté lors de la révision des termes du Traité de Montreux. Il a toujours utilisé cette question pour inciter Ankara à soutenir ses positions. Cependant, la Turquie a toujours défendu la position de minimiser la présence de navires de guerre provenant de pays extérieurs à la mer Noire afin d'éviter l'instabilité dans la région, dont elle serait directement victime. Ce serait également le meilleur argument en faveur de Moscou pour limiter la présence de l'OTAN. D'autres analystes politiques russes partagent ce point de vue.
Cependant, malgré l'intérêt de Moscou, la question reste un sujet de discussion restreint au sein de la Douma d'État russe afin d'éviter tout impact sur les relations diplomatiques russo-turques et de renforcer la position d'Ankara envers l'OTAN. Par conséquent, Moscou est susceptible de limiter les questions et les débats des députés criméens à la chambre basse de l'Assemblée fédérale russe, et d'utiliser plutôt les canaux diplomatiques bilatéraux pour négocier la modification de la Convention de Montreux.