Six raisons pour lesquelles le président Poutine a choisi la Chine pour son premier voyage à l'étranger après son cinquième mandat.
(Baonghean.vn) - Le Dr et expert Andrei Kortunov - Président du Conseil académique du Conseil russe des affaires internationales, a souligné 6 raisons particulières pour lesquelles le président Vladimir Poutine s'est rendu en Chine juste après sa 5e prise de fonction, pour 2 jours (16-17 mai).
L'expert Kortunov a commenté que la rencontre entre les deux dirigeants, Vladimir Poutine et Xi Jinping, constituera un événement important, voire « unique », dans la vie internationale.
Visite de retour
En mars 2023, juste après avoir été réélu président pour la troisième fois, M. Xi Jinping a également choisi la Russie comme destination de sa première visite officielle.
Et maintenant, le président Poutine, réélu en mars 2024, a rendu la pareille à l'amitié de son « ami » et partenaire de longue date en se rendant en Chine, avant d'effectuer des voyages en Turquie, en Iran et en Corée du Nord.
Cette décision est symbolique et souligne l'importance de la Chine pour la Russie.

Développement des relations économiques
L'année 2023 devait être une année faste pour la coopération économique russo-chinoise : les échanges bilatéraux devaient atteindre le chiffre record de 240 milliards de dollars. Cependant, les principaux pays occidentaux sont déterminés à freiner, au minimum, cette dynamique de coopération. En conséquence, l'Occident a accru la pression économique et politique sur Pékin ces six derniers mois. Cette situation a suscité des inquiétudes croissantes au sein du secteur privé chinois quant aux répercussions négatives potentielles de sanctions indirectes.
Après l'imposition par l'Union européenne du douzième train de sanctions contre la Russie en décembre 2023, certaines grandes banques chinoises ont hésité à accepter les paiements en dollars américains en provenance de Russie. Cette situation a affecté la dynamique des échanges bilatéraux russo-chinois, qui avaient connu une croissance soutenue pendant deux ans. En mars 2024, une baisse de 2 % a été enregistrée. Parallèlement, les exportations chinoises vers la Russie ont diminué de 14 % en mars par rapport à la même période en 2023 (passant de 8,9 milliards à 7,6 milliards de dollars), tandis que les exportations russes vers la Chine ont continué de progresser pour atteindre 12 milliards de dollars.
Les résultats des échanges bilatéraux en avril 2024 étaient également mitigés : les exportations chinoises vers la Russie se sont partiellement redressées en mars, atteignant 8,3 milliards de dollars, mais les importations chinoises en provenance de Russie ont chuté à 11,4 milliards de dollars.
Le récent voyage du secrétaire d'État américain Antony Blinken en Chine en avril 2024 a une fois de plus confirmé que Washington continuerait de compliquer autant que possible les relations économiques russo-chinoises.
Le président russe Vladimir Poutine et le président Xi Jinping devront donc s'attacher à bloquer ces efforts américains et à faire en sorte que les échanges bilatéraux atteignent effectivement 280 à 290 milliards de dollars d'ici fin 2024, comme prévu initialement.
Les sommets ont tendance à agir comme de puissants catalyseurs pour le commerce et les investissements bilatéraux.

Répondre aux enjeux mondiaux
Nombreux sont ceux qui espéraient que 2024 marquerait un tournant dans la politique mondiale – un passage des conflits et des confrontations à la réconciliation et à la coopération – mais qui ont été déçus. Le monde est entré dans une année 2024 encore plus dramatique, marquée par de nombreux événements tragiques survenant simultanément dans différentes parties du globe.
Les conflits russo-ukrainiens et israélo-palestiniens se poursuivent ; les forces houthies du Yémen continuent d’attaquer des navires militaires et commerciaux en mer Rouge ; la situation au Sahel et au Soudan reste instable ; aucun progrès n’a été réalisé en matière de non-prolifération nucléaire ; les dépenses mondiales de défense et le commerce des armes atteindront des niveaux historiques en 2024.
Par ailleurs, l’année 2024 offre également de nombreuses opportunités que la Russie et la Chine ne peuvent ignorer. C’est l’année idéale pour les BRICS de donner suite à leur récent élargissement, qui double le nombre de leurs membres, et d’instaurer de nouvelles formes de coopération. Notamment, la Russie assumera la présidence tournante en 2024 et accueillera le prochain sommet des BRICS à Kazan à l’automne.
Par ailleurs, l'Organisation de coopération de Shanghai pourrait également entamer sa transformation en acceptant le Bélarus comme membre, et l'organisation rechercherait de nouvelles opportunités de coopération multilatérale.
Les dirigeants russes et chinois devront discuter d'un large éventail de questions liées à l'instabilité croissante dans le monde et coordonner leurs actions pour répondre aux changements rapides qui s'opèrent.

Conflit avec l'Ouest
Les relations tendues avec l'Occident ont également été un sujet central de discussion entre le président Poutine et le président Xi Jinping.
Quelques jours avant sa rencontre avec le président Vladimir Poutine, le président Xi Jinping est rentré d'une tournée européenne qui l'a conduit en France, en Hongrie et en Serbie. Il s'agissait de la première visite d'un dirigeant chinois en Europe depuis cinq ans, et elle a permis à Xi d'évaluer en profondeur les différents points de vue des pays européens sur les perspectives des relations avec la Chine et la Russie.
Selon Kortunov, les dirigeants russe et chinois ne sont pas totalement opposés, mais leurs visions de l'Europe moderne et de son rôle sur la scène internationale divergent légèrement. Le président Poutine reste très sceptique quant à l'« autonomie stratégique » des pays européens vis-à-vis des États-Unis, tandis que le président Xi Jinping espère que Pékin coopérera avec les puissances européennes, ainsi qu'avec l'ensemble de l'Union européenne, malgré la détérioration des relations sino-américaines.
La Russie a été contrainte de franchir des lignes rouges dans ses relations avec l'Europe, tandis que la Chine demeure dans une zone d'instabilité stratégique.
Le volume des échanges commerciaux entre la Chine et l'UE devrait atteindre 782,9 milliards de dollars américains d'ici 2023, les exportations chinoises vers l'UE dépassant les 500 milliards de dollars américains et les importations en provenance de l'UE atteignant 281,7 milliards de dollars américains.
Les résultats de l'élection présidentielle américaine de novembre seront également un sujet important dans la discussion entre le président Poutine et le président Xi Jinping.

Nouvel Ordre Mondial
L'une des principales tâches pour la Russie et la Chine, explique Kortunov, est de trouver des intérêts mondiaux communs dans un monde volatil et imprévisible où les trajectoires de développement des différents pays sont non seulement difficiles à faire coïncider, mais de plus en plus différentes.
Les points de vue de la Russie et de la Chine sur la restructuration du système international sont assez proches sur des aspects fondamentaux. Il est donc important d'examiner à la fois les similitudes et les différences entre les principales composantes du nouvel ordre mondial.
Renforcer les relations entre les peuples
L’année 2024 marque le 75e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Russie et la Chine. C’est une excellente occasion d’organiser diverses activités, manifestations culturelles, expositions, séminaires d’affaires, initiatives d’investissement et conférences scientifiques, mais aussi de promouvoir le développement des échanges entre les peuples des deux pays.
Les dirigeants des deux pays accorderont vraisemblablement une attention particulière au développement des relations bilatérales dans les domaines de l'enseignement supérieur et des sciences, du tourisme et des échanges transfrontaliers.
M. Kortunov espère que les présidents Vladimir Poutine et Xi Jinping parviendront à une avancée majeure dans le processus d'exemption de visa entre les deux pays voisins. Actuellement, la Chine exempte de visa les citoyens de douze pays : l'Autriche, la Belgique, la Hongrie, l'Allemagne, l'Irlande, l'Espagne, l'Italie, le Luxembourg, la Malaisie, les Pays-Bas, la France et la Suisse.

D'après M. Kortunov, nombre de conversations entre le président Poutine et le président Xi Jinping se dérouleront en coulisses. Les résultats précis des pourparlers russo-chinois ne seront probablement pas annoncés immédiatement après leur conclusion. Toutefois, les dirigeants des deux pays pourraient publier une déclaration politique ou une déclaration conjointe faisant état des points de consensus et d'une liste de priorités communes.
Lorsque ce document sera largement diffusé, il deviendra certainement le sujet de prédilection de tous ceux qui souhaitent connaître la dynamique actuelle et les perspectives de développement des relations russo-chinoises.
En réalité, une rencontre entre deux dirigeants, même s'il s'agit du président Vladimir Poutine et du président Xi Jinping, a peu de chances d'inverser toutes les tendances négatives du développement mondial. Par conséquent, selon Kortunov, il ne faut pas s'attendre à des miracles de cette rencontre. Des relations bilatérales stables et efficaces entre la Russie et la Chine ne sauraient se substituer à des formats multilatéraux plus novateurs.
Cependant, l'expert Kortunov a déclaré qu'il est indéniable que la relation personnelle étroite entre le président Vladimir Poutine et le président Xi Jinping joue un rôle important, contribuant à la stabilité générale du monde instable d'aujourd'hui.


