Le champ de bataille d'Idlib avant la rencontre Poutine-Erdogan
La rencontre entre le président turc Erdogan et le président russe Poutine à Moscou le 5 mars devrait permettre d'apaiser les tensions à Idlib (Syrie).
Selon le commentateur Mikhaïl Khodarenok, colonel à la retraite ayant servi dans l'état-major des forces armées russes, la situation dans la province syrienne d'Idlib s'est calmée ces derniers jours, apparemment pour « attendre » les résultats de la rencontre entre le président turc Erdogan et le président russe Poutine à Moscou le 5 mars.
Photo : Global Look Press |
Pertes des forces gouvernementales syriennes
Selon M. Khodarenok, cinq unités turques sont actuellement déployées à Idlib, totalisant environ 4 700 soldats, 129 mortiers et pièces d'artillerie et 15 lance-roquettes multiples. Les capacités de combat des forces turques sont renforcées par des unités de guerre électronique et des drones polyvalents de combat et de reconnaissance.
Les drones de combat ont causé le plus de dégâts aux véhicules blindés de l’armée syrienne au combat, et les frappes aériennes des drones ont été une plus grande préoccupation pour les unités de chars d’Assad que les canons antichars et les systèmes de missiles antichars.
L'armée syrienne a subi des pertes importantes dans le conflit, avec des centaines de soldats tués ou blessés. De nombreux chars, véhicules de combat d'infanterie, mortiers et pièces d'artillerie ont été gravement endommagés, même si les experts affirment que le matériel est réparable.
Les alliés de l'armée ont également été touchés : 43 membres d'une milice soutenue par l'Iran ont été tués lors d'une attaque contre un poste d'observation (utilisé par la Turquie) à Idlib. Des unités du Hezbollah ont également subi des pertes, bien qu'elles n'aient participé à aucun combat de première ligne.
Ces derniers jours, des avions militaires turcs ont violé l'espace aérien syrien à Idlib à trois reprises. Des chasseurs turcs ont également été impliqués dans des affrontements aériens, abattant deux bombardiers syriens, deux hélicoptères et, plus récemment, un avion d'entraînement de fabrication tchèque.
Le nombre de djihadistes diminue
Les djihadistes d'Idlib ont également subi de lourdes pertes. Au cours des trois derniers mois, leurs effectifs ont été réduits de plus de moitié, pour atteindre entre 12 000 et 13 000 combattants. Ces pertes ne sont pas seulement dues aux pertes humaines, mais aussi à la fuite des combattants. Les groupes rebelles se retrouvent ainsi sans combattants expérimentés ni unités bien entraînées.
La situation à Idlib semble s'être apaisée. Si l'armée du président Assad lance une opération, l'artillerie et les roquettes turques riposteront immédiatement et soutiendront la contre-offensive des djihadistes.
La Turquie a fourni aux groupes djihadistes des armes et des équipements modernes, notamment des véhicules blindés de transport de troupes de fabrication américaine, des systèmes de missiles antichars et des systèmes de missiles de défense aérienne à basse altitude MANPADS.
On ignore encore qui possède les capacités nécessaires pour utiliser des MANPADS au sein des groupes rebelles. Il est possible que la Turquie forme ces groupes ou qu'elle exploite elle-même ces systèmes MANPADS sous couvert des rebelles.
côté turc
L'armée syrienne a abattu 12 drones turcs Anka et 7 drones Bayraktar lors d'opérations récentes.
Au début de la campagne, l'armée syrienne ne disposait d'aucun armement efficace pour abattre les drones turcs. Toutes les capacités de défense aérienne syriennes étaient concentrées presque exclusivement autour de la capitale Damas. Ce n'est que lorsque les systèmes Pantsir-S et Buk-M2E furent déployés sur le champ de bataille que la situation changea.
Pendant ce temps, les militants ont continué d'attaquer la base aérienne russe de Hmeimim. Ces attaques n'ont fait aucune victime et n'ont causé que des dégâts mineurs, ce qui suggère que les systèmes de défense aérienne de la base fonctionnaient efficacement.
Les rebelles se sont désormais retirés dans une zone située à 55 km de la base de Hmeimim et les tirs de roquettes ont presque complètement cessé. Cependant, si la Turquie fournit aux rebelles des lance-roquettes multiples, la situation pourrait à nouveau changer.
Vague de réfugiés
Il y a actuellement environ 200 000 personnes déplacées dans la zone frontalière entre la Syrie et la Turquie, dont 85 000 vivent dans des camps de réfugiés tels que Hazano, Sarmada, Sheikh Hassan, Baskaria, Darkush et Salkin.
Pendant ce temps, l'opération Rameau d'olivier menée par la Turquie en 2018 à Afrin a forcé 250 000 personnes (principalement des Kurdes) à fuir la région ; l'opération Source de paix de 2019 dans le nord de la Syrie a également déplacé 135 000 personnes (principalement des Kurdes).
La politique de la Turquie visant à réinstaller des Turcs ethniques dans les anciens territoires kurdes a conduit à un changement radical dans la composition ethnique des régions.
L'armée syrienne « suspend » sa campagne
Pour continuer à mener des opérations à Idlib, l'armée syrienne devra faire une pause de 2 à 3 semaines pour restaurer ses capacités de combat, reconstituer ses armes, son équipement et ses forces.
Les forces syriennes doivent stocker davantage de ressources, notamment de munitions. C'est pourquoi elles pourraient ne pas être en mesure de libérer les territoires bordant l'autoroute M4 avant le 5 mars.