« Contes de fées sur l'humanité »
(Baonghean) - Mon fils Bim vient d'entrer en CP cette année. Il apprend à lire et à écrire, alors il passe ses journées à réciter des poèmes appris à l'école. Aujourd'hui, il a récité un poème dont le passage suivant :
« Connaître les désirs des enfants
Histoires du passé et du futur
Je ne comprends pas d'où ça vient.
Mais tu y retournes..."
Soudain, il s'arrêta de lire et me regarda d'un air heureux : « Maintenant, Bim sait pourquoi il y a des grands-parents. Les grands-parents doivent lui lire des contes de fées, tu ne trouves pas ? » J'étais stupéfaite. Pour être honnête, je ne me suis jamais posé la question : « Pourquoi y a-t-il des grands-parents ? » ou « Pourquoi y a-t-il des personnes âgées ? ». Mais pourquoi ?
Il fut sûrement un temps dans l'histoire humaine où l'on se posait cette question. Je me souviens d'une histoire ancienne à propos d'un roi qui décida un jour d'enfermer tous les vieillards de la capitale dans la forêt profonde. Il pensait que les anciens étaient un fardeau pour les jeunes, qu'ils étaient impuissants, difficiles et dépendants des services d'autrui. Un fils, incapable d'envoyer son père dans la forêt, désobéit aux ordres du roi et le cacha dans un entrepôt. Soudain, une terrible épidémie se déclara dans toute la capitale, incurable. Tous les anciens, ceux qui avaient survécu aux épidémies de cette maladie ancestrale, furent envoyés dans la forêt. À ce moment-là, le père sortit de sa cachette et expliqua à tous comment guérir la maladie. C'est alors que les jeunes comprirent que les anciens sont des miroirs reflétant le passé, l'histoire et le savoir ancestral. Sans passé, il n'y aurait ni présent ni futur.
Si je raconte cette histoire à mon Bim, comprendra-t-il ? Je pense que c’est très difficile. Beaucoup d’adultes ne comprennent même pas ce principe. Dans de nombreuses familles, la coexistence entre les générations est aussi tendue que la Guerre froide du XXe siècle. Dans de nombreuses agences, des jeunes perçoivent leurs prédécesseurs comme un obstacle à leur progression professionnelle. C’est une confrontation inutile, indigne et inacceptable dans notre société, car elle va à l’encontre de l’ordre de la création. Il y a un avant, puis un après, il y a hier, puis aujourd’hui, il y a un commencement, puis l’éternité. C’est un cycle qui assure l’existence de la vie, comme si, dès l’origine, nos chromosomes n’étaient que de petites molécules, emmagasinant des souvenirs millénaires pour former les individus complets d’aujourd’hui et de demain.
Si nous ne savons pas aimer et chérir notre image d'hier, lorsqu'elle aura disparu, nous verrons que quelque chose en nous est brisé. Nous verrons que ce qui est sacré et précieux n'exige pas que nous nous interrogeions sur sa raison d'être. La raison réside dans le sang qui coule dans nos veines, ce même flux qui coule depuis la nuit des temps. Comme si je me souvenais soudain de quelque chose, j'ai demandé à Bim quel était le titre du poème qu'il venait de lire : « Contes de fées sur les humains ».
Hai Trieu