Tant d’espoir, tant de déception !
(Baonghean) - Après des mois de diplomatie non-stop et près de 13 heures de négociations le week-end dernier à Genève (Suisse), le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et son homologue américain John Kerry se sont mis d'accord sur un plan de cessez-le-feu en Syrie et ont établi les bases du processus de paix dans ce pays du Moyen-Orient.
Considérée comme un « tournant » et une « opportunité historique », est-ce la dernière page de la crise syrienne ?
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Le secrétaire d'État américain John Kerry (à gauche) et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov (à droite) sont parvenus ce week-end à un accord historique sur un cessez-le-feu en Syrie. Photo : CNN. |
Consensus intérieur et extérieur
Le secrétaire d'État américain John Kerry a qualifié le nouvel accord avec la Russie de tournant dans la guerre qui a fait 500 000 morts en Syrie ce week-end. En réponse, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré que cet accord contribuerait à étendre la lutte contre le terrorisme et à acheminer de l'aide aux civils syriens sous l'égide des Nations Unies.
Selon les observateurs, le nouvel accord de cessez-le-feu en Syrie peut être considéré comme la meilleure occasion jamais offerte aux parties en conflit de s'asseoir à la table des négociations, de progresser vers une résolution du conflit et de rechercher la paix par la voie diplomatique. De plus, cet accord prévoit également une aide humanitaire et une coopération militaire conjointe contre les groupes terroristes qui sévissent dans le pays.
En vertu de l'accord, la Russie fera pression sur le gouvernement syrien pour qu'il cesse toutes les attaques contre l'opposition armée syrienne dans certaines zones, tandis que les États-Unis devront convaincre les rebelles modérés de couper leurs liens avec le Front al-Nosra, une filiale d'Al-Qaïda, et d'autres groupes terroristes.
Le cessez-le-feu débutera à minuit le 12 septembre et durera une semaine, coïncidant avec la fête musulmane de l'Aïd al-Adha. Il est le fruit d'efforts diplomatiques inlassables entre les parties, en particulier la Russie et les États-Unis, dont les plus récents ont été quatre rencontres entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays depuis le 26 août et une rencontre directe entre le président russe Poutine et le président américain Obama en Chine.
Plus heureux encore, le 10 septembre, l'agence de presse officielle syrienne SANA a rapporté que le gouvernement syrien avait accepté l'accord de cessez-le-feu négocié par la Russie et les États-Unis. Par ailleurs, plusieurs pays comme la Turquie, l'Égypte, le Royaume-Uni et la France ont salué cet accord.
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La crise syrienne, qui dure depuis cinq ans et a fait 500 000 morts, attend toujours une conclusion définitive. Photo : CNN. |
Effort ou calcul ?
Il est indéniable que les États-Unis et la Russie ont tous deux leurs raisons de conclure un cessez-le-feu en Syrie cette fois-ci. La Russie doit également surveiller les agissements des autres pays, surtout après que la Turquie a rejoint de manière inattendue les États-Unis pour lutter contre l'EI en Syrie. Il est clair que la Turquie a ses propres calculs, dont la Russie n'a pas connaissance.
C'est pourquoi certains estiment que la Russie et le gouvernement syrien ont cette fois-ci fait marche arrière en acceptant de laisser le gouvernement syrien cesser ses frappes aériennes contre des cibles de l'opposition et de laisser cette tâche aux forces aériennes russes et américaines. Cette attitude est radicalement différente de celle des années précédentes, lorsque la Russie et le gouvernement syrien s'étaient fermement opposés à l'ultimatum américain exigeant que l'aviation syrienne ne survole pas le territoire kurde en Syrie.
Parallèlement, du côté américain, l'administration du président Obama souhaite probablement aussi profiter d'une période plus calme avant l'importante élection présidentielle de fin d'année. Deuxièmement, l'annonce d'un cessez-le-feu en Syrie pourrait également marquer le pas de M. Obama à la fin de son mandat.
Mais d'un autre point de vue, de nombreux avis estiment que le récent accord renforcera la légitimité des États-Unis et de la Turquie en Syrie. Cette initiative non seulement renforce le rôle des États-Unis et de la Turquie dans la zone d'instabilité syrienne ; pour les États-Unis, il s'agit également d'entraîner la Turquie plus profondément dans le conflit syrien. Plus la Turquie sera perturbée par le terrorisme intérieur et la guerre civile syrienne, plus le rôle des États-Unis sera renforcé. Bien entendu, Ankara reviendra alors progressivement dans l'orbite que les États-Unis convoitent depuis toujours.
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Alep – La ville morte. Photo : CNN. |
Toujours un désastre
Parvenir à un accord est une avancée majeure, mais sa mise en œuvre est encore loin d'être achevée. L'accord entre la Russie et les États-Unis vient de parvenir à un accord sur la nécessité de filtrer les forces d'opposition et les terroristes. Cependant, c'est là que réside la difficulté et le principal désaccord non résolu entre la Russie et les États-Unis au cours des négociations : quels seront les critères et la base de classification des groupes terroristes issus de l'opposition qui se multiplie en Syrie ? Parmi eux, on trouve notamment des groupes financés par les États-Unis. Ces forces elles-mêmes sont en cours de transformation, changeant de nom pour échapper aux frappes aériennes du gouvernement syrien, ce qui rend difficile pour Washington de les distinguer clairement.
Du côté russe, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a également souligné qu'il était impossible de garantir à 100 % la conclusion de l'accord, car de nombreuses parties sont impliquées dans le processus de résolution de la crise syrienne. Autrement dit, le respect de cet accord dépendra de l'attitude non seulement du gouvernement syrien, des factions armées de l'opposition, mais aussi d'une tierce partie, les organisations terroristes qui dominent la situation en Syrie. Par ailleurs, le Haut Comité des négociations (HCN), principale force d'opposition en Syrie, a récemment déclaré ne pas avoir encore reçu le texte officiel de l'accord.
Revenons à la situation sur le terrain en Syrie. Quelques heures seulement après la conclusion d'un accord de cessez-le-feu entre la Russie et les États-Unis le 10 septembre, le Centre des médias d'Alep a rapporté qu'au moins 45 personnes avaient été tuées ce jour-là lors d'intenses frappes aériennes à Alep et dans ses environs. Ces violences ont immédiatement jeté une ombre sur la situation, laissant de nombreux Syriens peu optimistes quant aux perspectives de ce cessez-le-feu.
On peut donc dire que l'effort est là. Il convient toutefois de noter qu'en février dernier, la Russie et les États-Unis ont également conclu un accord de cessez-le-feu similaire en Syrie, mais cet accord a été rompu peu après. Parallèlement, chaque solution à la crise syrienne repose toujours sur des calculs individuels. Par conséquent, la fin de cinq ans de guerre civile dans ce pays du Moyen-Orient pourrait bien être impossible !
Phuong Hoa
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