Le FMI met en garde l'UE contre les projets d'utilisation d'actifs russes au profit de l'Ukraine.
Le Fonds monétaire international a conseillé à l'UE de faire preuve d'une « extrême prudence » quant à l'utilisation des avoirs russes gelés pour financer l'Ukraine, mettant en garde contre le risque pour le système monétaire mondial.

Le Fonds monétaire international (FMI) a appelé à la plus grande prudence concernant le « prêt de compensation » que l’Union européenne (UE) envisage d’accorder à l’Ukraine. Selon le FMI, toute décision d’utiliser les actifs souverains de la Russie doit reposer sur une base juridique solide et prendre en compte tout impact potentiel sur le système monétaire international.
Appel du FMI
Le Kyiv Post (Ukraine) a publié le 20 octobre l'information selon laquelle l'UE propose un prêt de compensation visant à convertir les avoirs souverains gelés de la Banque centrale russe en obligations européennes d'une valeur équivalente. Ce prêt est garanti par des actifs d'une valeur de 176 milliards d'euros (191 milliards de dollars) détenus chez Euroclear en Belgique.
Le FMI n'a toutefois pas donné d'avis précis sur le mode de financement. Alfred Kammer, directeur du département Europe du FMI, a déclaré que l'institution ne pouvait pas commenter la structure financière du prêt.
« Nous recommandons aux pays qui envisagent d'utiliser des avoirs russes gelés de rechercher au préalable une base juridique solide et de prendre en compte tout impact sur le système monétaire international », a souligné M. Kammer lors de sa présentation des perspectives économiques de la zone euro.
Bien que M. Kammer n’ait pas précisé quelles pourraient être ces implications, l’avertissement du FMI établit un seuil élevé de légitimité et de stabilité mondiales pour toute action impliquant des avoirs d’État gelés.
Risques juridiques et garanties de l'UE
La question des risques juridiques et financiers a fait l'objet de vifs débats parmi les dirigeants et experts européens. Jamison Firestone, avocat new-yorkais, soutient que le prêt de réparations proposé par l'UE à l'Ukraine ne présente aucun risque supplémentaire pour Euroclear ni pour la Belgique. Selon cet argument, leurs avoirs seraient simplement convertis de liquidités en obligations de l'UE d'une valeur équivalente, sans alourdir ainsi la charge financière ou juridique.
Toutefois, le Premier ministre belge, Bart De Wever, a insisté pour que les 26 autres pays de l'UE garantissent conjointement le prêt et partagent les risques juridiques et financiers, afin d'éviter que la Belgique ne soit tenue responsable du remboursement à la Russie si les sanctions sont levées et que la Russie cherche à recouvrer ses avoirs.
Outre les préoccupations juridiques, certains ont également averti que l'utilisation des avoirs gelés de la Russie pourrait nuire au marché obligataire du G7 et saper la confiance dans les obligations d'État occidentales.
Cependant, l’économiste Elina Ribakova a qualifié ces avertissements – y compris ceux provenant d’Arabie saoudite – de « bruit de marché à motivation politique ».
Mme Ribakova a commenté le pouvoir de la Banque centrale européenne (BCE), affirmant que la BCE est « trop grande et trop puissante pour qu'un groupe d'investisseurs puisse lui résister ».
Contexte des besoins financiers de l'Ukraine
La prudence du FMI intervient alors que l'Ukraine est confrontée à un déficit budgétaire important. Selon une source fiable citée par le Kyiv Post, le FMI estime ce déficit à 65 milliards de dollars pour la période 2026-2029.
Bien que l'Ukraine devrait recevoir 37,4 milliards de dollars de financement international au cours des deux prochaines années, cela engendrerait un déficit similaire. Sergiy Nikolaychuk, vice-gouverneur de la Banque nationale d'Ukraine (BNU), a indiqué que les sources de financement pour 12,7 milliards de dollars en 2026 et 29 milliards de dollars en 2027 restent à déterminer.
Ce besoin urgent de financement a accru la pression sur l'UE pour qu'elle trouve des solutions créatives, y compris en utilisant des actifs russes, malgré les appels à la prudence du FMI.


