Quand la joie double...

Sous le soleil printanier de Tri Le (Que Phong). Photo : Quoc Dan

1.Nous avons tous pensé au bonheur à un moment ou un autre. Certains, après avoir peiné à le trouver, le définissent comme une ombre. Difficile à saisir, et plus on le poursuit, plus il s'enfuit. Il semble juste devant nous, mais il est aussi si lointain…

Un jour, accablé de chagrin, au crépuscule d'un après-midi d'hiver, je traversai le pont reliant les deux rives de la rivière Lam. Sur la rivière calme et brumeuse, un couple de pêcheurs était blotti contre lui, dînant dans la cale du bateau. Le bateau – leur maison – était tout petit, la lampe à huile projetait une ombre sur le visage de la femme, l'air travailleur mais rayonnant de bonheur. Elle prit une baguette dans le bol de riz de son mari. Le mari, je suppose, regardait sa femme avec affection… Oh, m'exclamai-je, était-ce là l'image même du bonheur ? J'aurais tant aimé être comme eux, à cet instant, libérée de l'agitation et de la tristesse que je ressentais. Pouvoir dériver, au-dessus était le ciel, en dessous était l'eau, aux côtés d'un être cher…

Mais combien de temps serai-je heureux ? Combien de temps les lumières de la ville, les repas au restaurant me manqueront-ils ? Combien de temps les chambres climatisées, les écrans de télévision, les ordinateurs me manqueront-ils ?

J'ai soudain réalisé que les gens ne seront jamais heureux s'ils ne pensent qu'à eux-mêmes, aux fardeaux qu'ils portent, à ce qu'ils veulent échanger, à ce que les autres ont, souhaitent et désirent.

2.Frank Tyger, journaliste et dessinateur américain, a dit un jour : « Si vous voulez du bonheur, donnez-le aux autres. » Ce que Frank voulait dire, c'est que nous serons heureux si nous prenons soin de ceux qui nous entourent et les partageons. En apportant de la joie à quelqu'un, nous en créons aussi pour nous-mêmes.

Au premier abord, cela semble facile, mais en réalité, ce n'est pas chose aisée. La vie est complexe et compétitive. Parfois, les gens se forgent leurs propres barrières lorsqu'ils ne savent pas surmonter la jalousie et l'égoïsme. Parfois, dans l'étroitesse de la vie, nous pensons que notre vie vaut plus que tout. Nous oublions que si nous n'aimons pas, si nous ne nous appuyons pas sur les autres, nous ne serons à jamais qu'une ombre solitaire se dressant désespérément dans la boue.

Photo : Internet.

On dit que la joie est redoublée quand on sait partager. Les larmes s'atténuent et la douleur s'atténue si l'on trouve quelqu'un qui peut nous comprendre, nous apprécier et nous réconforter, qui saura peut-être comment guérir nos blessures.

Une histoire vraie que je garde toujours en tête est celle d'un peintre. Il peignait avec passion la nature, les fleurs et l'herbe, et croyait que dans ce monde, les gens vivraient dans la douceur. Ses tableaux, aussi clairs qu'un matin humide de rosée, aussi frais qu'un champ de fleurs sauvages rayonnant à l'aube, aussi paisibles que la surface d'un lac aux premiers rayons de l'automne… Toute sa vie d'artiste, il n'a eu de cesse de capturer ces images, ces émotions liées à la nature, comme un cadeau pour tous. Dans un tableau passionné, le peintre a peint des pissenlits. Il a emprunté une histoire française pour exprimer que les pissenlits, au parfum doux mais merveilleusement passionné, étaient répandus par le vent, apportant leur beauté à la terre et au ciel. Après avoir raconté son histoire, l'artiste m'a montré le tableau du pissenlit et m'a dit : « Cette petite fleur a offert son parfum au vent et au monde. Ce tableau pourrait aussi s'appeler Bonheur. »

Je me souviendrai toujours de son histoire, celle de l'artiste qui m'a apporté, à moi et à beaucoup d'autres, la joie de vivre grâce à ses magnifiques tableaux oniriques. Il avait raison : on ne peut être seul, on n'est vraiment heureux que lorsqu'on sait aimer et partager. Comme ces pissenlits, ils n'ont de sens que lorsque le vent porte leur parfum à travers le monde.

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