En lançant continuellement des objets, la Corée du Nord veut à nouveau provoquer ?

Selon le Comité des chefs d'état-major interarmées (JCS) sud-coréen, ces tirs faisaient partie des exercices de tir réel de Pyongyang. Cependant, par l'utilisation de lance-roquettes multiples et les déclarations fermes de la Corée du Nord ces derniers jours, il semble que Pyongyang cherche à perturber les négociations, longtemps au point mort.

Appliquer une pression

Le 3 mars, l'agence de presse officielle nord-coréenne KCNA a rapporté que le dirigeant Kim Jong-un avait inspecté un exercice d'artillerie à longue portée le 2 mars et confirmé que Pyongyang avait procédé à son premier tir cette année. Le 9 mars, la Corée du Nord aurait tiré trois projectiles non identifiés dans la mer du Japon. Deux tirs consécutifs en moins d'une semaine ont suffi à émouvoir à nouveau le Japon, la Corée du Sud et la communauté internationale après deux mois relativement calmes.

À Séoul, en Corée du Sud, les habitants regardent les informations sur les tirs de missiles nord-coréens. Photo : AP

Dans son message du Nouvel An 2020, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a menacé de lancer prochainement une nouvelle arme stratégique pour les États-Unis si Washington ne lève pas les sanctions ou ne fait pas preuve de plus de bonne volonté dans les négociations. Selon les experts, cette « arme stratégique » pourrait être un missile balistique intercontinental (ICBM) ou un missile mer-sol balistique (SLBM). Bien que la Corée du Sud et les États-Unis aient récemment annulé pour une durée indéterminée leurs exercices militaires annuels de printemps, que la Corée du Nord a dénoncés comme une répétition d'invasion, ces derniers tirs ne font probablement pas partie des simples exercices de tir réel du pays.

À l'occasion du premier anniversaire du deuxième sommet américano-nord-coréen de Hanoï, certains estiment que les nouveaux tirs d'essai de la Corée du Nord visent à rappeler aux États-Unis et aux pays concernés l'impasse dans laquelle se trouvent les négociations. Pyongyang souhaite également tester la réaction de ses voisins, le Japon et la Corée du Sud, ainsi que de la communauté internationale, face à une arme stratégique dont Pyongyang a mis en garde.

Le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un inspecte un exercice militaire le 29 février. Photo : Reuters

Dans un geste sans précédent, la sœur du dirigeant nord-coréen, Kim Yo-jong, a pour la première fois averti que les critiques de la Corée du Sud à l'égard des exercices militaires de Pyongyang du 2 mars étaient irrespectueuses. Et que les activités de la Corée du Nord ne visaient à menacer personne. Commentant l'annulation des exercices militaires américano-sud-coréens, elle a également affirmé que cette décision avait été prise en raison des inquiétudes liées à l'épidémie de Covid-19, et non par souci de paix.

Depuis son apparition, il s'agit de la première déclaration publique de Kim Yo-jong, qui adresse un message fort à la Corée du Sud et aux États-Unis. L'opinion publique sait que la sœur cadette du dirigeant Kim Jong-un adopte une position modérée et entretient des relations amicales avec Séoul. Les observateurs estiment que, d'une part, Pyongyang souhaite afficher son impatience dans le processus de négociation, mais qu'il vise également une manœuvre politique intérieure en souhaitant accroître progressivement l'influence, la voix et la position de Kim Yo-jong au sein de l'appareil politique du pays.

Stratégie silencieuse

En fait, les dernières actions de la Corée du Nord sont parfaitement compréhensibles : malgré ses nombreuses menaces, l'administration du président américain Donald Trump semble totalement indifférente. Récemment, après le tir d'essai nord-coréen du 2 mars, interrogé sur la réaction des États-Unis, Donald Trump a simplement répondu : « Non ! » et « Pas de réaction ! ». Le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a ensuite déclaré que Trump souhaitait maintenir une stratégie de silence sur toutes les questions liées à la Corée du Nord. De fait, alors que les primaires démocrates se déroulent dans une période houleuse pour désigner le candidat unique pour la finale de novembre, le président Donald Trump semble avoir plus de temps libre. Car, actuellement, il n'a aucun adversaire au sein du Parti républicain et se concentre sur la bataille contre le candidat démocrate à la fin de l'année.

Les poignées de main entre le président américain Donald Trump et le dirigeant Kim Jong-un appartiennent désormais au passé. Photo : Maison Blanche

Dans ce contexte, « garder le silence sur la question nord-coréenne » sera une priorité absolue pour s'assurer le soutien des électeurs et contribuer à la victoire finale. Par conséquent, malgré la pression croissante exercée par la Corée du Nord, il est peu probable que le président américain parvienne à une avancée décisive sur la question nord-coréenne cette année. D'un autre point de vue, Mintaro Oba, ancien fonctionnaire du Département d'État américain en poste en Corée du Nord, a analysé que la réaction de M. Trump reflète simplement une faille majeure dans la politique américaine envers la Corée du Nord !

De leur côté, comme à l'accoutumée, la Corée du Sud et le Japon ont également réagi. L'armée sud-coréenne se maintient actuellement en état d'alerte, surveillant de près la situation et se prémunissant contre d'éventuels tirs supplémentaires de la Corée du Nord. Parallèlement, le Premier ministre japonais Shinzo Abe a également demandé que les informations sur le dernier tir nord-coréen soient intégralement collectées et analysées, tout en prenant des mesures pour assurer la sécurité des vols et des navires en mer, et en se préparant pleinement aux situations imprévues.

Le trio États-Unis-Corée du Sud-Corée du Nord connaît de nombreux destins. Photo : Daily Beast

Cependant, en Corée du Sud, le président Moon Jae-in doit affronter des élections générales cruciales en avril, et les inquiétudes liées à la pandémie ont accaparé la majeure partie de son temps et de son énergie. Parallèlement, des pays comme le Japon, la Chine et les États-Unis sont eux aussi trop occupés par la prévention et le contrôle des maladies.

Dans un tel contexte, certains avis suggèrent qu'il pourrait s'agir d'un autre objectif de la Corée du Nord lors des récents tirs : démontrer sa volonté de développer un nouveau type d'arme et faire pression sur les pays concernés, mais aussi éviter de les inciter à réagir de manière excessive, ce qui créerait une situation trop tendue et nuirait aux négociations !