La force militaire la plus puissante mais « secrète » du monde

Un pays qui apparaît rarement sur la scène internationale possède des armes sophistiquées, impose le service militaire obligatoire et est toujours prêt à déployer son armée dans la région. Il s'agit des Émirats arabes unis.

Le prince héritier Mohammed Bin Zayed Al Nahyan d'Abou Dhabi assiste à la cérémonie de clôture d'un exercice militaire conjoint entre les Émirats arabes unis et la France dans le désert d'Abou Dhabi le 2 mai 2012.

Un pays qui était autrefois peu présent sur la scène internationale acquiert des armes sophistiquées, met en place un service militaire obligatoire et développe une flotte d’avions de chasse et de camions lourds.

Un pays de moins de 10 millions d'habitants, mais qui serait toujours prêt à utiliser son armée dans toute la région.

Le signe le plus marquant de cette situation est apparu en août, lorsque les Émirats arabes unis ont rejoint l'Égypte pour bombarder les forces islamistes qui tentaient de s'emparer de la capitale libyenne. En 2011, les Émirats ont fourni 12 avions à la campagne internationale visant à renverser Mouammar Kadhafi. La même année, ils ont fourni des troupes à la force multinationale qui a écrasé le soulèvement à Bahreïn, et le pays a également participé aux opérations contre le groupe État islamique.

En 2013, les Émirats arabes unis se classaient au 15e rang des pays au monde qui dépensent le plus d'argent en matière de défense, selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm. Leurs dépenses militaires ont presque doublé au cours de la dernière décennie. Ils disposent également du deuxième budget de défense le plus important parmi les géants pétroliers du Golfe, avec 14 milliards de dollars, après l'Arabie saoudite.

Les Émirats arabes unis sont en passe de devenir le troisième plus grand importateur mondial d’équipements de défense d’ici 2015.

Un réseau de cités-États monarchiques, dont Dubaï et Abou Dhabi, renforce désormais sa puissance militaire au Moyen-Orient.

Un avion de chasse F-16 des Émirats arabes unis (EAU) lance un missile lors d'un exercice militaire conjoint avec l'armée française dans le désert d'Abou Dhabi le 2 mai 2012.

Les Émirats arabes unis ont soutenu leur déploiement militaire par une politique étrangère affirmée et une réflexion indépendante.

Ni l'Égypte ni les Émirats arabes unis n'ont prévenu les États-Unis des frappes aériennes contre l'État islamique en Libye. L'AFP a rapporté que ces attaques « signifiaient une démarche directe des États arabes qui ont déjà mené des guerres par procuration en Libye, en Syrie et en Irak pour asseoir leur pouvoir et leur influence ».

Parallèlement, les États-Unis et leur allié, les Émirats arabes unis, ont rejoint la lutte contre l'EI. Ils ont été l'un des cinq pays arabes impliqués dans la campagne aérienne contre le groupe et ont autorisé des avions de chasse australiens à survoler leur territoire. Les États-Unis ont également basé leurs avions sur la base aérienne d'Al Dhafra, près d'Abou Dhabi.

Les Émirats arabes unis participent également à des opérations de renseignement visant à empêcher la croissance de l'EI. La semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères, Cheikh Abdullah bin Zayed al-Nahyan, a mis en garde contre le risque de liens accrus entre l'EI et le groupe terroriste al-Shabab, affilié à Al-Qaïda dans la péninsule somalienne.

« Alors que des groupes comme Daesh (EI) développent des liens avec des réseaux criminels et des réseaux d’armes comme al-Shabab, nous devons les empêcher d’étendre leurs activités maritimes et de menacer des voies navigables vitales comme le détroit d’Ormuz, la mer Rouge, Bab al-Mandeb et le golfe d’Aden », a déclaré Zayed al-Nahyan lors d’une conférence contre la piraterie à Dubaï.

Des membres des forces armées des Émirats arabes unis assistent à la cérémonie d'ouverture du Salon international de la défense (IDEX) le 17 février 2013.

Les Émirats arabes unis, l'Égypte, l'Arabie saoudite et le Koweït négocient toujours la formation d'une coalition qui « n'a pas l'intention d'intervenir en Irak ou en Syrie, mais agira séparément pour cibler d'autres foyers extrémistes », selon l'AP. Un officier militaire égyptien, sous couvert d'anonymat, a déclaré que des conflits se préparaient en Libye et au Yémen, où les forces chiites ont pris le contrôle de la capitale.

L’Iran pourrait en fait expliquer pourquoi les Émirats arabes unis ont développé leur armée si rapidement.

La plupart des gens connaissent les Émirats arabes unis comme une puissance économique, Dubaï étant un centre financier mondial. Le pays possède également des gisements de pétrole et de gaz, ainsi que certains des ports les plus actifs du Moyen-Orient. Mais de l'autre côté du golfe Persique se trouve l'Iran, qui doit résoudre plusieurs différends frontaliers avec les Émirats.

Les Émirats arabes unis ont acquis plusieurs nouveaux navires et avions auprès des États-Unis, dont une version modernisée de l'avion de combat F-16, présentée comme la version la plus avancée de l'avion en service dans le monde. De plus, les Émirats envisagent l'acquisition de l'avion de combat F-35 de cinquième génération, qui pourrait leur conférer des capacités militaires supérieures à celles de leur voisin, plus grand et plus intrusif sur le plan géopolitique.

Les Émirats arabes unis pourraient également mettre à profit le temps consacré à la préparation de leur armée pour accroître leur prestige auprès de la communauté internationale. Cela explique peut-être pourquoi Abou Dhabi tient tant à être célébré pour sa fierté nationale : l'exploration spatiale. En juillet, le pays a annoncé la création d'une station spatiale d'ici 2021 et prévoit d'envoyer une sonde vers Mars.

Des Mirage 2000 (France) et des F-16 (USA) des forces des Émirats arabes unis participent à un exercice militaire conjoint avec l'armée française dans le désert d'Abou Dhabi le 2 mai 2012.

Mais les Émirats arabes unis devraient également y regarder de plus près.

Le Printemps arabe a démontré qu’aucun dirigeant de la région ne peut être totalement assuré de conflits internes et que l’environnement politique et sécuritaire du Moyen-Orient peut fluctuer de manière imprévisible.

Les Émirats arabes unis ont eu recours à la répression interne pour consolider la situation dans les régions troublées, en arrêtant des dizaines de militants islamistes et en expulsant des dirigeants de l’opposition laïque tels que le leader de la révolution du « Printemps arabe », Iyad al-Baghdadi.

Les dirigeants conservateurs du pays considèrent les islamistes comme une menace pour le régime actuel au Moyen-Orient. Cela pourrait expliquer la volonté des Émirats arabes unis de mener des frappes aériennes contre l'EI en Libye et en Syrie, ainsi que leur hostilité envers les groupes islamistes sur leur territoire.

Sur le plan intérieur, les Émirats arabes unis ont également instauré en juin dernier le service militaire obligatoire pour les hommes âgés de 18 à 30 ans. Ceux qui ont un diplôme d'études secondaires doivent servir pendant neuf mois, sinon pendant deux ans.

Les Émirats arabes unis demeurent un État autocratique à une époque où aucun Moyen-Orient ne dispose d'un dirigeant totalement sûr. C'est aussi un pays relativement prospère dans une région où des menaces peuvent surgir à tout moment et sans avertissement.

La militarisation croissante et les politiques de sécurité affirmées sont pour eux des moyens de survivre dans cet environnement instable.

Selon Infonet