International

Russie - Amérique :
La ligne rouge nucléaire remise en question

Hoang Bach November 8, 2025 6:33

Le président russe Vladimir Poutine a chargé de hauts responsables d'élaborer des propositions concernant la possibilité de procéder à des essais d'armes nucléaires, une mesure que Moscou n'avait pas prise depuis l'effondrement de l'Union soviétique.

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Cette décision intervient quelques jours seulement après l'annonce controversée du président américain Donald Trump concernant la reprise des essais nucléaires par Washington. Le monde est au bord d'une escalade de la course aux armements qui pourrait anéantir la maîtrise nucléaire en vigueur depuis plus de trente ans.

Ordres du Kremlin

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Le président Poutine préside une réunion du Conseil de sécurité russe le 5 novembre. Photo : REUTERS

Lors d'une réunion du Conseil de sécurité russe le 5 novembre, le président Vladimir Poutine a officiellement chargé le ministère des Affaires étrangères, le ministère de la Défense et les services spéciaux de mener l'enquête. Selon certaines sources, M. Poutine a demandé à ces agences de « tout mettre en œuvre pour recueillir davantage d'informations sur ce sujet, de les analyser au sein du Conseil de sécurité et de formuler des propositions communes quant à l'éventualité d'entamer les préparatifs d'essais d'armes nucléaires ».

Toutefois, le dirigeant russe a également insisté sur une position « défensive ». Il a affirmé que la Russie « respecte toujours scrupuleusement ses obligations au titre du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE) et n’a aucune intention de s’en écarter ». M. Poutine a souligné que Moscou ne réagirait de manière « adéquate » que si Washington procédait en premier à des essais nucléaires.

La décision de M. Poutine intervient alors que les relations américano-russes se sont rapidement détériorées ces dernières semaines. Le président Trump, apparemment frustré par l'absence de progrès dans le conflit ukrainien, a annulé un sommet prévu avec M. Poutine et imposé de nouvelles sanctions à la Russie depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier.

La réaction de Moscou découle directement de la déclaration du président Donald Trump le 30 octobre. Quelques heures seulement après l'annonce par le président Poutine du succès des essais nucléaires russes de la torpille Poseidon, Trump a tweeté avoir ordonné au Pentagone de « commencer à tester nos armes nucléaires sur un pied d'égalité » avec la Russie et la Chine. Cette déclaration a immédiatement suscité l'inquiétude internationale, les États-Unis n'ayant pas procédé à un essai nucléaire depuis 1992. Cependant, le nœud du problème réside dans la grave ambiguïté de la déclaration de Trump. Les rapports n'ont pas précisé s'il faisait référence à des essais de détonation – interdits par les traités internationaux – ou simplement à des essais de vecteurs, tels que les missiles balistiques, qui sont effectués régulièrement. Certaines sources occidentales ont noté que le secrétaire américain à l'Énergie, Chris Wright, a semblé clarifier la situation le 3 novembre, indiquant que les nouveaux essais ordonnés par M. Trump n'impliqueraient pas d'explosions nucléaires. Pour Moscou, toutefois, cette ambiguïté, conjuguée aux récentes initiatives militaires de Washington, a suffi à déclencher une réaction au plus haut niveau.

La limite des 30 ans est remise en question.

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Le président américain Donald Trump. Photo : REUTERS

La réunion du Conseil de sécurité russe a été marquée par des déclarations fermes, visiblement préparées avec soin. Le président de la Douma d'État (chambre basse), Viatcheslav Volodine, a interrogé Moscou sur sa réaction au plan de Donald Trump, déclenchant une série de déclarations. Le ministre de la Défense, Andreï Beloussov, a indiqué à Poutine que les récentes actions et déclarations américaines avaient « considérablement accru la menace militaire pesant sur la Russie ». M. Beloussov a suggéré que les « préparatifs en vue d'essais nucléaires à grande échelle » débutent immédiatement. Il a également souligné que le site d'essais de Nouvelle-Zemble, dans l'Arctique, pourrait être opérationnel à très court terme. Le chef d'état-major des armées, Valery Guerassimov, a lui aussi insisté sur la nécessité d'agir rapidement. « Si nous ne prenons pas les mesures qui s'imposent dès maintenant », a averti M. Guerassimov, « nous perdrons le temps et l'opportunité de réagir promptement aux actions américaines ». Il a expliqué que le délai de préparation des essais nucléaires, selon leur type, varie de « plusieurs mois à plusieurs années ». Ces déclarations laissent entrevoir des pressions, voire un consensus, au sein de l'état-major russe quant à la nécessité d'adopter une position résolue.

Si une puissance nucléaire reprenait ses essais nucléaires, cela engendrerait une déstabilisation géopolitique majeure. La Corée du Nord est le seul pays à avoir procédé à des essais nucléaires depuis le début du XXIe siècle (le dernier essai recensé remonte à 2017). Les grandes puissances nucléaires ont fait preuve de retenue pendant des décennies : l’Union soviétique (puis la Russie) n’a pas effectué d’essais depuis 1990 ; les États-Unis observent leur propre moratoire sur les essais nucléaires depuis 1992. Ces retenues s’inspirent de l’esprit du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), bien que sa validité juridique demeure fragile. Les États-Unis ont signé le TICE, mais ne l’ont pas encore ratifié au Sénat. En 2023, le président Poutine a signé une loi révoquant la ratification du traité par la Russie, invoquant la nécessité de garantir un « statut égal » avec les États-Unis. Les analystes y voient l’aboutissement d’une spirale d’actions et de réactions. « Personne n’a besoin de ça, mais nous y arrivons peut-être », a commenté Andrey Baklitskiy, chercheur principal à l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), sur le réseau social X.

Pour nuancer ces déclarations fermes, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a précisé à la presse que le président Poutine n'avait pas fixé de délai précis pour ces propositions. Interrogé par CNN, M. Peskov a déclaré : « Rien n'est encore décidé… Nous étudions simplement l'opportunité d'entamer les préparatifs. » Cette déclaration montre que Moscou, tout en se préparant au pire, reste ouvert à toutes les possibilités et attend une clarification officielle de Washington quant aux véritables intentions du président Trump. Parallèlement, la ligne rouge sur les essais nucléaires – l'un des derniers piliers de l'architecture de sécurité mondiale de l'après-guerre froide – est mise à rude épreuve depuis 30 ans.

Une image de l'arsenal nucléaire mondial

La Russie et les États-Unis sont les deux plus grandes puissances nucléaires au monde, surpassant de loin le reste du monde en nombre d'ogives nucléaires qu'ils possèdent.

  • Russie : On estime qu'elle possède 5 459 ogives nucléaires.
  • États-Unis : Possède environ 5 550 ogives nucléaires.
  • Chine : On estime qu'elle possède environ 600 ogives nucléaires.
  • Parmi les autres États dotés de l'arme nucléaire figurent la France, la Grande-Bretagne, l'Inde, le Pakistan, Israël et la Corée du Nord.

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