Un nouveau facteur dans les relations entre la Russie et l'Occident
(Baonghean) - Mercredi 23 décembre, le Comité d'enquête fédéral russe a annoncé l'arrestation par contumace et l'arrestation internationale de l'ancien magnat Mikhaïl Khodorkovski - 2 semaines après que cette personne ait fait une déclaration appelant à « une révolution contre le gouvernement actuel ».
Mikhaïl Khodorkovski, 52 ans, vit en exil à Londres et en Suisse depuis sa libération en 2013. L'homme le plus riche de Russie a été emprisonné pendant plus de 10 ans pour avoir orchestré le meurtre du maire de Nefteyugansk, en Sibérie, où se trouvait le siège de la compagnie pétrolière Ioukos et qui était une source majeure de ses revenus.
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Mikhaïl Khodorkovski en juin 2015 à Washington (États-Unis) Photo : AFP |
La victime aurait pris des décisions contraires aux intérêts de Ioukos avant d'être assassinée par deux employés de la société sous la direction du patron Mikhaïl Khodorkovski.
Le 25 octobre 2003, l'ancien magnat fut arrêté suite à deux condamnations pour « évasion fiscale » et « vol à grande échelle par fraude ». À l'époque, on suggérait que Khodorkovski avait été victime d'une « purge politique » orchestrée par le Kremlin. Tous ses actifs furent repris par une société cotée en bourse, et le Kremlin élimina un rival politique redoutable. Bien sûr, il ne s'agissait là que d'une hypothèse kremlinophobe.
Aujourd'hui, la bataille juridique du Kremlin contre Khodorkovski se déroule dans un contexte quelque peu différent. Khodorkovski s'est exilé à Londres, loin des tribunaux moscovites et des camps de prisonniers sibériens, mais continue de provoquer le Kremlin. L'ancien magnat poursuit secrètement des poursuites internationales contre d'anciens dirigeants de Ioukos.
Plus récemment, en juillet 2014, la Cour internationale de justice de La Haye, capitale mondiale de la justice, a jugé que la Russie avait dissous Ioukos pour des raisons politiques et lui a condamné à une amende record de 37 milliards d'euros. Bien que la Russie ait rejeté cette amende, des procédures de recouvrement sont toujours en cours en France, en Belgique, en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis.
Mais le plus remarquable est que Mikhaïl Khodorkovski se soit exprimé sur la scène politique, rompant ainsi sa promesse de cesser de critiquer le Kremlin à sa libération. Ancien oligarque « paria », Khodorkovski a fondé le mouvement Russie ouverte pour rallier l'opposition russe. Il a également contribué à la publication d'une enquête sur les liens entre la mafia russe et des personnalités proches du pouvoir du Kremlin.
Plus récemment, le 9 décembre, il a même prononcé un discours attaquant violemment l'actuel président russe Vladimir Poutine lors d'une conférence de presse à Londres : « La Russie a été témoin d'un coup d'État illégal : des lois illégales ont été votées par un parlement illégal, appliquées par un gouvernement illégal et un système judiciaire non indépendant. Pour revenir à un véritable État de droit, une révolution est nécessaire. »
La Russie a rapidement intensifié les poursuites judiciaires contre Khodorkovski et ses partisans. Mardi 22 décembre, la police fédérale russe a arrêté plusieurs membres du mouvement Russie ouverte à Moscou.
L'ancien magnat n'aurait peut-être pas attiré autant l'attention du Kremlin et de la communauté internationale sans les tensions actuelles entre la Russie et l'Occident. Il est évident que les poursuites judiciaires contre Khodorkovski ont été « assouplies » par la Russie après sa libération en 2013 et n'ont été « relancées » que récemment.
Certes, Khodorkovski lui-même n'est pas la seule raison : il a d'ailleurs toujours défendu une position anti-système en Russie. Alors pourquoi une personnalité aussi banale est-elle soudainement devenue le centre d'attention de la scène politique mondiale ? Est-ce parce qu'un tel facteur, dans le contexte actuel, est susceptible d'affecter les relations entre la Russie et l'Occident, selon l'orientation choisie par les deux parties ?
Une révolution contre le Kremlin – l'idée peut paraître irréaliste pour une Russie bénéficiant d'un large soutien au président Vladimir Poutine, mais qui peut garantir que les Russes – ou du moins une partie d'entre eux – ne changeront pas si la situation économique intérieure continue de se détériorer ? L'Occident exerce une pression sur la Russie, et si la nouvelle solution qu'il choisit consiste à soutenir une opposition disposant déjà d'une base et d'une force sur son territoire, ce scénario ne plaira pas aux responsables du Kremlin.
Le président russe traverse peut-être une période difficile en politique internationale, mais il est extrêmement « plein » d'énergie en politique intérieure. Cela ne signifie pas que le Kremlin sous-estime les dangers provenant de l'intérieur du pays, et la décision ferme prise contre Khodorkovski en est la preuve la plus tangible. Un Khodorkovski ne réussira certainement pas un « coup d'État » en Russie, mais de nouvelles possibilités et voies d'affrontement entre l'Occident et la Russie s'ouvrent progressivement.
Thuc Anh
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