Comment Poutine surmonte-t-il les tempêtes ?
Les trois mandats du président Vladimir Poutine ont été riches en bouleversements et en changements, non seulement pour la Russie, mais aussi pour le monde. Comment le journaliste russe Viktor Marakhovsky analyse-t-il sa décision de se représenter ?
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Le président Poutine lors de la cérémonie de remise du Prix du Bénévolat, le 6 décembre. Photo : REUTERS |
Le président Poutine lors de la cérémonie de remise du Prix du Bénévolat, le 6 décembre - Photo : REUTERS
« Vladimir Poutine a annoncé sa candidature à la présidence ! » Cette information, comme beaucoup l'accordent, n'est pas surprenante. Presque tous les événements publics auxquels M. Poutine a participé ces derniers mois étaient plus ou moins liés à la possibilité de briguer un nouveau mandat.
Le fait que M. Poutine ait fait cette déclaration lors d'une réunion avec les ouvriers de la « légendaire » usine automobile GAZ (et non à la télévision ou lors d'un jour férié, comme le Nouvel An, par exemple) a une signification symbolique importante.
Il montre quels représentants de la Russie d'aujourd'hui M. Poutine reconnaît comme les éléments les plus importants et principaux de la société et de l'État.
La réunion à GAZ signifie que M. Poutine, dans son quatrième mandat (s'il remporte les élections), continuera à compter sur le soutien de la « majorité » - ceux qui ont toujours un mécontentement caché envers la classe d'élite qui se fait appeler « société civile ».
Il faut dire ici que le soutien populaire est une ressource que M. Poutine a utilisée avec beaucoup de prudence au fil des ans.
Peut-être des dizaines ou des centaines de fois auparavant, les analystes russes et étrangers avaient prédit que l'élite, mécontente des sanctions et de la lutte avec l'Occident, organiserait une « rébellion judiciaire » contre le président qui avait perdu le soutien de la majorité.
Il était évident qu’à la fin de la journée, rien ne s’était passé.
Il y a bien eu une révolte des élites, mais elle n'a pas été une révolution au sommet durant les trois mandats présidentiels de Poutine. Le Front national, pro-Poutine, a joué un rôle de garant, empêchant toute révolte « aristocratique » durant le processus de construction de l'État.
La tentative la plus notable de contrer la « majorité poutinienne » fut probablement le « mouvement Bolotnoïe » de 2011-2012. Cependant, isolant socialement et n'ayant pas atteint un caractère « révolutionnaire », ce mouvement constitua la seule résistance de l'élite.
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Investiture de Poutine à la présidence (à gauche) en mai 2000, aux côtés de feu Boris Eltsine. Photo : RIA |
Investiture du président Poutine (à gauche) en mai 2000, à côté du défunt président Boris Eltsine - photo d'archives RIA
Plus particulièrement, au cours du troisième mandat de M. Poutine, qui touche bientôt à sa fin, une série de défis graves et sans précédent sont apparus, mettant à l’épreuve la durabilité de l’ensemble du système.
Premièrement, les prix du pétrole ont chuté à deux reprises, alors que le budget russe reposait fortement sur les exportations d'énergie. Il en a résulté une récession et, pour la première fois depuis de nombreuses années, la qualité de vie des Russes a considérablement diminué.
C'est durant ce mandat que se produisit le mouvement Maïdan en Ukraine (2014) et ses conséquences désastreuses : la péninsule de Crimée fut annexée par la Russie ; le transfert du pouvoir à Kiev créa un État non reconnu près de la frontière russe ; une guerre civile prolongée...
Au cours de cette période, les pays occidentaux et le groupe terroriste État islamique (EI) ont également attaqué le gouvernement syrien du président Bachar Al Assad, l'un des derniers alliés de la Russie au Moyen-Orient.
Finalement, à la fin de l'année 2017, la fierté nationale russe a été mise à mal ! Le Comité international olympique a décidé d'interdire le drapeau russe aux Jeux olympiques d'hiver de 2018 en Corée du Sud.
Presque chaque événement de ce type a été suivi par des légions d'analystes le proclamant « coup fatal à Poutine ». Aujourd'hui, chacun peut vérifier ces prédictions et les comparer à la réalité.
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M. Poutine a conservé un style simple lors d'un rassemblement au complexe sportif Luzniki en février 2012. Photo : RIA |
M. Poutine a gardé un style simple lors d'un rassemblement au complexe sportif Luzniki en février 2012 - photo d'archives RIA
Mais ce n'est pas parce que tout se déroule sans accroc que la campagne de Poutine en 2017-2018 sera sans accroc, ni que l'élection se déroulera sans opposition. Le plus grand défi viendra de la propre majorité de Poutine.
Ce défi se résume dans l'idée suivante : « La Russie d'aujourd'hui est construite pour l'élite, pas pour les masses. » Cette idée a été maintes fois reprise dans les médias de gauche russes.
Cela se manifeste de trois manières : (1) L’écart de revenu entre la minorité riche et le reste du monde s’accroît ; (2) La qualité de l’éducation décline et ne favorise que les riches ; (3) Les soins de santé déclinent également et favorisent les riches.
Ces arguments seront largement utilisés par les adversaires de M. Poutine. Cependant, leur objectif n'est pas de remporter les élections de mars 2018, mais seulement d'empêcher une victoire absolue de M. Poutine.
S’ils parviennent à devenir une opposition, ils entreront dans l’arène politique au début des années 2020, lorsqu’il n’y aura plus de « majorité poutinienne ».
C'est un grand défi, mais d'un autre côté, la réponse est également assez claire : le « candidat Poutine » a juste pour but de montrer au peuple russe quels compromis il peut réellement faire avec le « président Poutine ».
Selon Tuoi Tre
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