Panama : nouvelle « arène » des États-Unis et de la Chine ?
Le président chinois Xi Jinping se rendra au Panama au début du mois prochain dans le but de renforcer les liens qui ont fait l'objet de vives critiques de la part des États-Unis.
L'avertissement de Washington
Un communiqué de la présidence panaméenne indique que le président Juan Carlos Varela et Xi signeront environ 20 accords de coopération lors de la visite « sans précédent » des 2 et 3 décembre.
Début juillet, les deux pays ont négocié un accord de libre-échange qui pourrait transformer le pays d’Amérique centrale en une plaque tournante pour les produits chinois à travers l’Amérique latine.
La visite de Xi Jinping intervient après que le Panama a rompu ses relations avec Taïwan et établi des liens avec la Chine en juin dernier. Le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Qin Gang, a déclaré le 23 novembre que la visite de Xi Jinping réaffirmait l'engagement de Pékin envers les pays d'Amérique latine et que la coopération entre les deux parties resterait « inchangée » malgré l'instabilité de la conjoncture mondiale.
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Le président chinois Xi Jinping arrivera au Panama peu après sa rencontre prévue avec Donald Trump. Photo : AP |
Avec le canal de Panama, long de 80 km, reliant les océans Atlantique et Pacifique, le pays d'Amérique centrale a joué un rôle clé dans la domination américaine dans l'hémisphère occidental.
Il n’est pas surprenant que l’administration du président américain Donald Trump ait récemment critiqué en permanence l’influence croissante de la Chine dans la région et ait mis en garde les pays voisins contre les risques potentiels liés à la stratégie d’investissement de la Chine.
Plus récemment, lors du sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC) en Papouasie-Nouvelle-Guinée la semaine dernière, le vice-président américain Mike Pence a averti les pays de ne pas se laisser « tenter » par l'initiative « Ceinture et Route » (BRI) de Pékin.
Ce conflit a transformé l'Amérique centrale en premier « champ de bataille » d'influence entre les grandes puissances depuis que les États-Unis y ont combattu l'Union soviétique pendant la guerre froide.
Il est à noter que M. Xi Jinping est arrivé au Panama juste après sa rencontre prévue avec M. Donald Trump en marge du sommet du G20 en Argentine le 1er décembre.
Les intentions de Pékin
L'ancien ambassadeur du Mexique en Chine, Jorge Guajardo, a déclaré au South China Morning Post que la visite de Xi au Panama peu après les critiques de Pence montrait que Pékin n'avait pas peur de rivaliser pour gagner en influence dans la sphère d'influence traditionnelle des États-Unis.
Dans le même temps, l'expert Francisco Luis Perez de l'Université Tamkang (Taïwan) a déclaré que Pékin cherchait à accroître son influence en Amérique latine pour contrer la présence des États-Unis et de la région indo-pacifique.
D’un autre côté, les diplomates en Amérique latine affirment que Washington est le seul responsable de son retrait de la région, permettant ainsi à Pékin d’intervenir et d’établir des liens économiques et diplomatiques plus forts.
Les dirigeants de la région ont généralement ignoré les avertissements américains parce qu'ils ont besoin d'argent pour des projets d'infrastructures et la Chine est prête à le fournir, selon le Tribune News Service.
De nombreux pays africains s’ouvrent également aux investissements chinois malgré les craintes que la BRI puisse créer un piège de la dette, comme l’a montré la Sierra Leone.
Le mois dernier, l’administration du président Julius Maada Bio a décidé de rejeter un prêt de 300 millions de dollars accordé par la Chine pour construire un nouvel aéroport international, une décision que les analystes ont rapidement saluée, craignant que le projet ne plonge davantage le pays le plus pauvre du monde dans la dette.
Cependant, quelques jours seulement après l'annonce, M. Bio a déclaré qu'il recherchait toujours le soutien de Pékin pour construire un pont d'une valeur de plus d'un milliard de dollars et a laissé ouverte la possibilité de renégocier le prêt pour le projet d'aéroport.
Selon le New York Times, de nombreux gouvernements, comme celui de la Sierra Leone, sont prêts à ignorer les risques pour l'économie en empruntant massivement à la Chine. Le Fonds monétaire international (FMI) prévient que 40 % des pays d'Afrique subsaharienne sont au bord d'une crise de la dette.
L'Afrique dans son ensemble a une dette extérieure de 417 milliards de dollars, dont 20 % est détenue par la Chine. Pourtant, de nombreux pays africains sollicitent des prêts auprès de Pékin pour construire des aéroports, des autoroutes, des voies ferrées, des barrages, etc. Le problème, selon les critiques, est que les grands projets d'infrastructures entrepris par les entreprises chinoises sont trop coûteux !