Comment l’augmentation du soutien à l’armement de l’Occident affecte-t-elle le conflit entre la Russie et l’Ukraine ?

La Grande Bataille du Donbass

La course à la préparation à la bataille dans le Donbass se poursuit, la Russie concentrant ses forces et déplaçant des véhicules militaires vers l'est de l'Ukraine tandis que les États-Unis et leurs alliés augmentent les transferts d'armes vers l'armée ukrainienne.

Chars ukrainiens dans la région de Lougansk, le 26 février. Photo : AFP

Le président russe Vladimir Poutine avait auparavant déclaré que les négociations de paix entre la Russie et l'Ukraine étaient dans l'impasse et que Moscou se concentrait actuellement sur la « libération » de l'ensemble du Donbass, dont un tiers est actuellement sous le contrôle des séparatistes soutenus par la Russie. Certains observateurs prédisaient que Marioupol, troisième ville du Donbass, tomberait aux mains de la Russie dans les prochains jours.

Le Donbass est une zone relativement plate, contrairement aux zones urbaines proches de Kiev. Elle est également idéale pour les opérations de l'artillerie et des chars russes, même si les pluies peuvent transformer le sol en boue. La Russie rencontre également moins de problèmes logistiques grâce à sa proximité avec son propre territoire, ainsi que moins de difficultés de communication et d'organisation.

L'Occident renforce son soutien et son aide en matière d'armement

Les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN ont intensifié les livraisons de chars, d’hélicoptères et d’armes lourdes à l’Ukraine alors que ses forces se préparent à une guerre à grande échelle avec la Russie dans la région du Donbass.

Les récentes livraisons d'armes témoignent d'un changement dans le soutien occidental à l'Ukraine depuis ses débuts. Elles témoignent également d'une évolution de la nature des systèmes d'armes, passant de systèmes défensifs tels que les missiles antichars à des systèmes plus offensifs.

Plus tôt ce mois-ci, la République tchèque a décidé d'envoyer des chars à l'Ukraine, devenant ainsi le premier pays de l'OTAN à le faire depuis que la Russie a lancé son opération militaire en Ukraine le 24 février. La République tchèque a également fourni des véhicules de combat d'infanterie et des systèmes d'artillerie à l'Ukraine.

D'autres pays de l'OTAN ont également pris des mesures similaires pour expédier du matériel militaire lourd à l'Ukraine le long des frontières de l'OTAN. La Slovaquie a fourni à l'Ukraine un système de défense aérienne avancé S-300, tandis que le 13 avril, les États-Unis ont annoncé qu'ils fourniraient à l'Ukraine du matériel militaire supplémentaire d'une valeur de 800 millions de dollars. Cette livraison comprend 11 hélicoptères MI-17, 200 véhicules blindés M113, 100 Humvees, 300 drones « kamikazes » Switchblade, des obusiers lourds, des milliers d'obus d'artillerie et d'autres munitions.

L’Ukraine a besoin de davantage de chars car le champ de bataille dans la région du Donbass, dans l’est de l’Ukraine, présente un terrain plus plat, ce qui facilite l’opération des chars.

Les États-Unis envisagent d'accroître leur aide militaire à l'Ukraine en lui envoyant de nouvelles armes. Un responsable américain de la défense, s'exprimant sous couvert d'anonymat, a indiqué que des plans étaient en cours pour envoyer des forces ukrainiennes dans les pays de l'OTAN en Europe de l'Est afin de les entraîner sur de nouveaux systèmes d'armes, tels que les obusiers et les radars de contre-mesures.

Washington rééquipe également ses alliés de l'OTAN en Europe de l'Est, qui ont fourni leurs systèmes d'armes à l'Ukraine. Après que la Slovaquie a fourni le système S-300 à l'Ukraine, les États-Unis y ont déployé l'un de leurs systèmes de défense aérienne Patriot. Les États-Unis ont également signé un important contrat d'armement avec la Pologne au début du mois, portant sur la fourniture à l'armée polonaise de 250 chars de combat Abrams.

Certains experts affirment que les États-Unis iront plus loin dans leur soutien aux alliés de l’OTAN comme la Pologne en rééquipant leurs forces aériennes avec des chasseurs F-16 afin que ces pays puissent transférer des chasseurs MiG en Ukraine.

Difficultés logistiques

Cependant, expédier des armes lourdes en Ukraine n'est pas chose aisée. Outre l'encombrement des armes et des véhicules eux-mêmes, toute expédition vers l'Ukraine nécessite un ensemble complexe de processus logistiques, incluant la formation, les pièces de rechange et la maintenance, pour garantir l'efficacité des véhicules sur le champ de bataille.

Canon antichar d'épaule Carl Gustaf M4. Photo : AP

« Un char n’est pas une voiture de location », a déclaré Ben Hodges, ancien commandant de l’armée américaine en Europe.

« Chaque fois que vous envisagez de déplacer des véhicules mécanisés ou blindés, vous devez penser aux pièces de rechange, aux packages de maintenance, à la formation, au carburant, aux munitions... pour que tout fonctionne. »

Un haut responsable américain de la défense a déclaré le 11 avril que plusieurs pays envisageaient toujours d'envoyer des chars en Ukraine, principalement des variantes de l'ère soviétique que l'armée ukrainienne a été formée à utiliser.

« Il s’agit d’un équipement que l’Ukraine connaît déjà, donc le temps de formation sera relativement rapide. »

Les complexités logistiques ont poussé certains gouvernements occidentaux à retarder des livraisons plus importantes d’armes lourdes à l’Ukraine, malgré les appels de hauts responsables ukrainiens à un soutien occidental accru à leurs forces.

Le principal fabricant d'armes allemand, Rheinmetall, a déclaré en début de semaine que Berlin était prêt à fournir jusqu'à 50 chars de combat Leopard 1 d'occasion à l'Ukraine, mais le gouvernement allemand n'a pas encore donné son feu vert. Certains responsables se sont opposés à cette idée, arguant que la formation de l'armée ukrainienne sur ces chars prendrait du temps, les systèmes d'armes soviétiques en Europe de l'Est étant plus populaires auprès des Ukrainiens que les chars de combat occidentaux. Le PDG de Rheinmetall, Armin Papperger, a cependant rejeté cette idée, affirmant que la formation ne durerait que quelques jours.

L'Ukraine, tout en saluant le changement d'attitude de l'Occident concernant les livraisons d'armes, a déclaré que cela n'était pas suffisant. D'anciens et actuels responsables ukrainiens ont affirmé que l'Occident pouvait encore faire davantage pour livrer des armes à l'Ukraine, alors que la guerre dans le pays s'apprête à entrer dans une nouvelle phase décisive.

Olena Tregub, présidente de la commission de défense indépendante ukrainienne anti-corruption, a déclaré que les nouvelles livraisons en provenance de l'Occident n'étaient pas suffisantes pour que l'Ukraine obtienne un avantage dans la guerre avec la Russie.

Risque de conflit généralisé

Certains responsables politiques allemands craignent désormais que l'augmentation des livraisons d'armes lourdes à l'Ukraine ne fasse de l'Occident une cible pour l'armée russe. Cette situation a même provoqué des divisions au sein de la coalition au pouvoir en Allemagne.

Le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Ryabkov, a également averti, dans une interview publiée le 13 avril, que la Russie considérerait les convois d'armes en provenance des pays de l'OTAN et à destination de l'Ukraine comme des cibles militaires légitimes. M. Ryabkov a expliqué que l'objectif actuel de Moscou est de faire comprendre aux États-Unis et à leurs alliés que la Russie utilisera des moyens puissants pour riposter aux tentatives visant à entraver l'armée russe en Ukraine.

« Nous avertissons que les convois d’armes des États-Unis et de l’OTAN sur le territoire ukrainien seront traités comme des cibles militaires légitimes. »

La Russie maintient cette position depuis le début de la guerre en Ukraine. Auparavant, le ministère russe de la Défense avait annoncé que l'armée russe avait détruit quatre systèmes de défense aérienne S-300 transportés en Ukraine par un pays européen.

Dans le même temps, M. Hodges craint que les pays occidentaux fournissant ce soutien militaire à l’Ukraine ne risquent de provoquer un conflit plus vaste entre l’OTAN et la Russie.

Le Washington Post a récemment rapporté, le 15 avril, que la Russie avait envoyé cette semaine une note diplomatique officielle aux États-Unis, avertissant que la poursuite par Washington et ses alliés du transport d'armes vers l'Ukraine pourrait entraîner des « conséquences imprévisibles ».

L'ambassadeur de Russie aux États-Unis, Anatoly Antonov, a également déclaré que le soutien militaire accru des États-Unis et de leurs alliés occidentaux à l'Ukraine ne faisait qu'aggraver le conflit et risquait de conduire à une confrontation militaire directe entre les États-Unis et la Russie.