« Les rebelles du Kosovo ont vendu les organes des prisonniers »
La Serbie a annoncé le 10 septembre qu'elle détenait au Kosovo un ancien témoin rebelle accusé d'avoir participé à l'ablation du cœur d'un prisonnier serbe pour le vendre au marché noir d'organes pendant le conflit du Kosovo dans les années 1990.
"Nous avons un témoin qui témoignera sur ce qui s'est passé dans le nord de l'Albanie, lorsque les organes de Serbes kidnappés ont été prélevés et vendus pendant le conflit de 1998-1999 au Kosovo", a déclaré à l'AFP le procureur serbe chargé des crimes de guerre, Vladimir Vukcevic.
Le procureur serbe Vladimir Vukcevic (Source : AFP)
« Il a décrit le prélèvement du cœur d'un prisonnier serbe sur un site près de Kukes (ville du nord de l'Albanie) à la fin des années 1990 » et le transport des organes vers l'aéroport de Rinas près de la capitale Tirana.
On ignore si le prisonnier était mort ou vivant au moment de l'opération, et le procureur a déclaré qu'il ne fournirait pas plus de détails. Vukcevic a déclaré que le témoin lui avait raconté l'opération et le prélèvement d'organes « en détail ». Vukcevic n'a pas identifié le témoin, précisant seulement qu'il était un ancien membre de l'Armée de libération du Kosovo (ALK), un groupe armé qui a combattu le gouvernement central serbe et qui réclame l'indépendance du Kosovo.
L'Union européenne (UE) enquête également sur cette affaire. Dick Marty, enquêteur du Conseil de l'Europe, a écrit dans un rapport de 2010 que de hauts commandants de l'UCK, dont l'actuel Premier ministre du Kosovo, Hashim Thaci, étaient impliqués dans le crime organisé, notamment le trafic d'organes humains.
Selon Marty, le réseau de trafic d'organes, pendant et après le conflit avec les forces serbes, entretenait des liens étroits avec Thaci. Le rapport indique que les organes étaient prélevés sur des prisonniers, dont beaucoup étaient serbes, et introduits clandestinement en Albanie par l'UCK.
Thaci, son gouvernement et la partie albanaise ont nié les allégations et condamné le rapport de Marty. « Nous enquêtons et vérifions ses affirmations depuis plus d'un an et nous pensons que les informations fournies par ce témoin sont exactes », a déclaré Vukcevic.
Suite au rapport de Marty, l'UE a demandé au procureur américain John Clint Williamson de mener une enquête. Vukcevic a déclaré espérer que « le témoignage de ce témoin sera utile à l'enquête de Williamson ».
L'affaire de trafic d'organes en temps de guerre serait liée à l'affaire Medicus, une autre affaire de trafic d'organes dans un hôpital de Pristina, la capitale du Kosovo. Sept personnes, pour la plupart des médecins, ont été jugées devant un tribunal kosovar parrainé par l'UE pour transplantations illégales d'organes à l'hôpital Medicus.
L'affaire a été révélée en 2008 après l'ouverture d'une enquête policière sur un jeune Turc qui s'était évanoui à l'aéroport de Pristina après avoir fait don d'un rein à un Israélien. Dans son rapport, Marty a déclaré qu'il existait des « indices crédibles » indiquant que le trafic d'organes au Kosovo en guerre était « étroitement lié » à l'affaire Medicus.
Les allégations de prélèvement d'organes sur des prisonniers par l'UCK ont été rendues publiques pour la première fois en avril 2009 dans un livre de l'ancienne procureure des Nations Unies chargée des crimes de guerre, Carla Del Ponte.
Des centaines de victimes, principalement des Serbes, ont été enlevées au Kosovo dans les dernières phases de la guerre et détenues dans des camps de concentration le long de la frontière avec l'Albanie, a-t-elle déclaré, citant des responsables de l'ONU et des journalistes anonymes.
Membres des forces de sécurité du Kosovo (Source : AFP)
Les allégations ont été examinées pour la première fois en mars 2004 par une équipe médico-légale de la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK), qui n'a « trouvé aucune preuve concluante » pour étayer ces allégations, selon un rapport confidentiel obtenu par l'AFP en 2008.
Mais José-Pablo Baraybar, ancien chef du Bureau des personnes disparues et de la police scientifique de la MINUK, qui a dirigé le groupe en 2004, a déclaré à l'AFP que l'affaire ouvrirait de nouvelles enquêtes et qu'il pensait qu'un trafic d'organes était "très probable".
Le Kosovo sera reconnu comme pleinement souverain par l'Occident le 10 septembre, en vertu d'une décision du Groupe de coordination internationale qui supervise le territoire depuis sa sécession unilatérale de la Serbie en 2008.
Belgrade, ainsi que de nombreux pays, dont la Russie, ont vivement nié l'indépendance du Kosovo. À ce jour, ce territoire est reconnu par environ 90 pays, dont les États-Unis et la plupart des membres de l'UE.
Selon (Vietnam+) - NT