« Un accord avec l’Afrique » et la tentative de sauver le « plan Merkel »
(Baonghean) - Aujourd'hui (19 novembre), la chancelière allemande Angela Merkel présidera un dialogue de haut niveau entre le groupe G20 et les dirigeants des pays africains dans le cadre de l'initiative « Pacte avec l'Afrique » lancée par l'Allemagne en 2017.
Cet événement est important non seulement pour l'Allemagne, en raison de son rôle de chef de file dans la promotion de la coopération avec l'Afrique, mais il revêt également une importance particulière pour Angela Merkel à titre personnel.
Car le « Pacte africain » est une initiative qui devrait inverser les critiques adressées personnellement à Mme Merkel en raison de sa politique d’« accueil à bras ouverts » envers les migrants, au cœur de la crise de 2015.
Sauver le « plan Merkel »
Lors de la réunion qui se tient aujourd'hui à Berlin, le « Pacte africain » sera une fois de plus au cœur des discussions, l'objectif principal étant de stimuler les flux d'investissements privés en Afrique tout en incitant les pays africains à réformer leurs économies.
Cet objectif a été mis en avant lorsque la chancelière allemande Angela Merkel a présenté l’initiative « Pacte avec l’Afrique » en 2017, alors que l’Allemagne assurait la présidence tournante du G20.
Initiée et pilotée par Angela Merkel, l'initiative fut alors connue sous le nom de « plan Merkel ». Malheureusement, depuis, l'accord n'a pas rencontré le succès escompté, et nombreux sont ceux qui, pessimistes, prédisent même son échec imminent.
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| La chancelière allemande Angela Merkel (premier rang, 4e à gauche) lors d'une rencontre avec des dirigeants africains fin 2018. Photo : EPA |
Lancée en 2017, l’initiative « Pacte avec l’Afrique » compte désormais 12 pays africains participants : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, l’Éthiopie, le Ghana, la Guinée, le Maroc, le Rwanda, le Sénégal, le Togo et la Tunisie.
Les pays du G20 espèrent qu'avec une forte participation du secteur privé, cette initiative permettra de dynamiser les investissements en Afrique et de favoriser une croissance durable sur le continent. Ceci est considéré comme un facteur essentiel pour réduire l'exode migratoire vers l'Europe, source de fortes pressions politiques, économiques et sociales pour les pays du Vieux Continent.
Mais après deux ans, les résultats de l’« Accord africain » sont bien en deçà des attentes. Les investissements étrangers dans les 12 pays africains participant à cette initiative ont à peine augmenté.
Entre 2017 et 2018, les investissements étrangers n'ont que légèrement progressé, atteignant 21 millions de dollars, un niveau inférieur à celui de 2016, année où l'initiative n'avait pas encore été lancée. De plus, 80 % de ces investissements se sont concentrés dans seulement quatre pays : l'Égypte, le Maroc, l'Éthiopie et le Ghana, tandis que les huit autres pays sont restés quasiment à l'écart.
Les pays africains déplorent également avoir pris des mesures pour créer un environnement propice aux investissements, mais que les flux d'investissements vers la région ne soient toujours pas débloqués. Le nombre d'emplois créés par cette initiative d'ici 2030 semble encore relever du rêve.
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| Le président égyptien El-Sissi (à gauche) est l'un des premiers dirigeants africains à arriver à Berlin. Photo : Egypt Independent |
Les entreprises privées ont leurs raisons de ne pas être enthousiastes à l'égard de l'initiative « Pacte avec l'Afrique ». D'un point de vue commercial, l'investissement d'une entreprise dans un pays dépend moins de son appartenance ou non à cette initiative que de sa capacité à trouver des débouchés pour ses produits.
Par ailleurs, le marché de 12 pays africains participant à l'initiative est jugé trop petit, tandis que des marchés présentant des niveaux de consommation relativement élevés, tels que le Nigéria, le Kenya ou l'Afrique du Sud, n'y sont pas inclus.
Bien entendu, Angela Merkel ne souhaite pas que son initiative s'éteigne ainsi. C'est pourquoi elle fonde de grands espoirs sur la possibilité de sauver le « plan Merkel » et de redonner vie à l'« accord pour l'Afrique » à l'issue du dialogue de haut niveau d'aujourd'hui.
Halo du passé
Pour sauver le « plan Merkel », les entreprises allemandes devront assurément être en première ligne. Bien que ne représentant pas directement le G20, l'Allemagne, en tant que pays leader en Europe aujourd'hui, occupe une place importante pour fédérer et promouvoir les initiatives au sein du bloc des pays les plus développés du monde.
Avec une économie fondée sur l'industrie manufacturière plutôt que sur les services, l'Allemagne s'enorgueillissait autrefois d'avoir impulsé une croissance économique rapide dans les pays d'Europe de l'Est après l'effondrement de l'Union soviétique au début des années 1990.
L’Allemagne espère une fois de plus briller comme par le passé en créant une percée en matière de croissance économique dans les pays participant à l’initiative « Pacte avec l’Afrique ».
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| Il est conseillé aux entreprises allemandes d'investir dans le développement des infrastructures en Afrique. Photo : FMI |
Pour éviter la « réputation » selon laquelle tous les engagements de l'Allemagne envers l'Afrique ne sont que des « projets », des « intentions »..., avant le dialogue de haut niveau d'aujourd'hui, l'Allemagne a annoncé un Fonds d'investissement pour le développement d'un milliard d'euros destiné à soutenir les entreprises privées investissant dans les pays africains dans le cadre de cette initiative, ainsi qu'à soutenir le développement des entreprises africaines elles-mêmes.
Par ailleurs, les entreprises allemandes qui décident d'investir en Afrique bénéficieront de nombreux avantages fiscaux de la part du gouvernement. Afin d'aider les entreprises à surmonter les obstacles liés à la taille du marché, les experts suggèrent aux entreprises privées allemandes d'investir dans le développement des infrastructures, des secteurs peu dépendants de la consommation.
En promettant 1 milliard d'euros pour soutenir l'investissement privé dans l'initiative « Pacte avec l'Afrique », la chancelière Angela Merkel espère créer une dynamique pour obtenir des engagements similaires de la part des autres membres du G20 lors du dialogue qui se tient aujourd'hui à Berlin.
Il y a près de cinq ans, alors que l'Europe était confrontée à la pire phase de la crise migratoire, Angela Merkel faisait la une des journaux en accueillant près d'un million de migrants, un nombre qui n'a cessé d'augmenter depuis.
La décision d’Angela Merkel était considérée comme « inévitable » compte tenu de la situation d’urgence de l’époque. Mais après avoir été saluée comme une « dirigeante compatissante », Angela Merkel a dû faire face à des critiques dans son pays lorsque l’afflux massif de migrants en Allemagne a entraîné une série de conséquences politiques, économiques et sociales.
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| Un bateau transportant des migrants en mer Méditerranée, au large des côtes libyennes. Photo d'illustration : AFP/TTXVN |
Le mécontentement suscité par la politique migratoire du gouvernement est considéré comme l'une des raisons de la montée en puissance du parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) lors de plusieurs élections allemandes récentes.
Par conséquent, les analystes estiment que la relance de l’initiative « Accord avec l’Afrique » revêt une importance particulière pour Mme Merkel à titre personnel, démontrant ainsi les progrès qu’elle a accomplis dans la résolution des conséquences de la politique migratoire qui fut un temps considérée comme la plus controversée de ses 13 années au pouvoir.
De plus, après avoir annoncé son retrait de la vie politique en 2021, désamorcer les critiques concernant la politique d'immigration de son gouvernement est considéré comme la responsabilité personnelle de Merkel de « préparer le terrain » pour les membres du Parti chrétien-démocrate dans la course à la succession de l'Allemagne.






