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Le sommet de Busan apporte un calme temporaire

Hoang Bach November 1, 2025 6:00

Cette semaine, le sommet entre le président américain Donald Trump et le président chinois Xi Jinping s'est tenu à Busan (Corée du Sud). Des signes évidents de désescalade étaient visibles : M. Trump a qualifié la rencontre de « 12 sur 10 » et M. Xi a évoqué un « consensus important ». Cependant, les analystes restent prudents. Aucune déclaration conjointe n'a été publiée et les questions stratégiques fondamentales demeurent. Nombreux sont ceux qui estiment qu'il ne s'agit que d'un accord transactionnel, d'un cessez-le-feu temporaire.

Désescalade

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Le président chinois Xi Jinping s'exprime lors d'une rencontre bilatérale avec le président américain Donald Trump à l'aéroport international de Gimhae, en marge du sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC) à Busan, en Corée du Sud, le 30 octobre. Photo : REUTERS

La première rencontre en face à face depuis six ans entre les dirigeants des deux plus grandes économies mondiales a duré une centaine de minutes, se terminant plus tôt que prévu. Elle a immédiatement donné un signe clair de désescalade des tensions, exacerbées par les mesures de rétorsion douanières et les différends relatifs aux terres rares. Le président Trump a annoncé sa visite en Chine en avril 2026. De son côté, le président Xi Jinping a qualifié cette rencontre de pas vers un « consensus important ». Bien qu'aucune déclaration conjointe n'ait été publiée, les deux parties ont évité toute déclaration pouvant être perçue comme un signe de faiblesse. Selon les observateurs, la brièveté de la réunion indique que les travaux préparatoires sur les questions clés avaient été menés à bien en amont. Il est fort probable qu'un « cadre d'accord très substantiel » ait été élaboré lors de la rencontre du 25 octobre à Kuala Lumpur (Malaisie) entre le secrétaire au Trésor américain, Scott Bessent, et le vice-Premier ministre chinois, He Lapfeng.

L'accord conclu à Busan comprenait une série d'engagements réciproques clairs, axés sur l'apaisement des tensions économiques les plus urgentes. Du côté chinois, ces engagements étaient précis. Pékin s'est engagé à redoubler d'efforts pour endiguer le flux de précurseurs chimiques utilisés dans la production de fentanyl, un opioïde de synthèse mortel qui constitue une priorité absolue pour l'administration Trump dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire. Par ailleurs, la Chine a accepté de suspendre pendant un an les restrictions sur les exportations de minéraux critiques, notamment les terres rares, vers les États-Unis, supprimant ainsi un levier économique dont elle disposait. Autre engagement clé : la reprise des achats de soja américain. Il s'agissait d'une victoire importante pour M. Trump, car les précédentes réductions des importations chinoises avaient fortement nui à son électorat rural. La Chine s'est engagée à acheter 12 millions de tonnes de soja d'ici janvier 2026 et 25 millions de tonnes par an pendant les trois années suivantes, selon le secrétaire au Trésor américain, Scott Bessent. Enfin, le ministère chinois du Commerce a déclaré qu'il collaborerait avec les États-Unis pour « régler correctement les problèmes liés à TikTok », laissant entendre qu'un accord sur la propriété américaine de l'application pourrait être imminent.

En contrepartie, les États-Unis ont également fait d'importantes concessions. La plus importante a été la réduction des droits de douane : le président Trump a accepté de les abaisser de 10 points de pourcentage, ramenant le droit de douane moyen effectif de 57 % à 47 %. Plus précisément, le droit de douane de 20 % lié au fentanyl a été réduit de moitié, à 10 %. Par ailleurs, les États-Unis suspendent l'enquête menée en vertu de l'article 301 sur les activités maritimes et navales de la Chine, allégeant ainsi la pression juridique sur ce secteur clé pour Pékin. Autre mesure notable : Washington suspend pendant un an les nouvelles restrictions imposées à la « Liste des entités », qui compliquent la tâche des entreprises chinoises souhaitant acquérir des technologies américaines interdites par le biais de filiales.

Outre les engagements majeurs, les deux parties ont également convenu de suspendre les mesures de rétorsion en matière de droits portuaires. M. Trump a par ailleurs affirmé sur le réseau social Truth Social que la Chine avait accepté d'acheter du pétrole et du gaz à l'Alaska, bien que des sources officielles aient indiqué par la suite que M. Xi s'était seulement « manifesté intéressé » par une participation à un nouveau gazoduc de GNL dans cette région. Le silence observé sur d'autres questions stratégiques a renforcé l'impression que la réunion de Busan visait principalement à gérer une crise économique conjoncturelle plutôt qu'à résoudre des désaccords géopolitiques fondamentaux.

« Un an » de silence ?

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Le président américain Donald Trump lors de la réunion. Photo : REUTERS

Les marchés financiers mondiaux ont réagi avec modération aux détails de l'accord, laissant penser que les investisseurs s'attendaient à un accord limité et ne croyaient pas qu'il modifierait fondamentalement la trajectoire des relations sino-américaines. Les analystes n'ont pas tardé à souligner le caractère transactionnel de l'accord. « Les réductions tarifaires en échange de la promesse de lutter contre le fentanyl offrent un répit temporaire, mais il s'agit d'un soulagement transactionnel, et non d'une réinitialisation structurelle », a déclaré à Reuters Craig Singleton, expert principal de la Chine à la Foundation for Defense of Democracies (FDD). « Rien n'a fondamentalement changé, et le cycle de coercition mutuelle reprendra dès que l'une des parties se sentira désavantagée. »

Par ailleurs, l'article de CNN souligne que l'accord actuel de Busan n'est qu'une ébauche et qu'aucun document n'a encore été signé. Washington considère toujours la Chine comme une menace pour sa domination mondiale. Pékin, de son côté, reste insatisfait des stratégies américaines en matière de droits de douane et d'endiguement. Les deux parties ne semblent s'accorder que sur un seul point : elles ne peuvent se permettre une confrontation de grande ampleur, que ce soit sur le plan commercial ou autre, à l'heure actuelle.

Des analyses économiques plus poussées montrent que même pleinement appliqué, l'accord de Busan a peu de chances de résoudre les problèmes économiques internes auxquels sont confrontés les deux pays. Pour les États-Unis, l'accord de reprise des achats de soja est jugé insuffisant et tardif. La période de pointe des récoltes aux États-Unis est déjà terminée et de nombreux agriculteurs ont probablement écoulé leurs surplus à des prix inférieurs. Par conséquent, l'impact positif sur les électeurs du secteur agricole pourrait ne pas être aussi important que l'espérait M. Trump. Plus important encore, le marché du travail américain s'affaiblit nettement. Des données récentes font état d'un ralentissement significatif des embauches. La politique tarifaire imprévisible de M. Trump a accru l'incertitude, dissuadant les entreprises d'embaucher. Désormais, les entreprises américaines commencent même à licencier. Pour la première fois depuis de nombreuses années, le nombre de chômeurs dépasse celui des offres d'emploi. Le développement de l'intelligence artificielle (IA) contribue également à cette vague de licenciements. Les responsables de la Réserve fédérale avertissent que si l'IA engendre une mutation structurelle de la demande de main-d'œuvre, la politique monétaire (telle que la baisse des taux d'intérêt) ne sera plus un outil efficace. Pour la Chine, l'impact d'une réduction tarifaire de 10 % est jugé négligeable au regard de ses problèmes internes. Louise Loo, responsable des études économiques sur l'Asie chez Oxford Economics, estime que cet accord « contribuera au maximum de 0,2 % à la croissance chinoise prévue pour l'année prochaine ».

En fin de compte, l’« atmosphère amicale » de Busan ne saurait masquer le caractère temporaire de ce « cessez-le-feu ». Les actions menées en amont du sommet, comme le feu vert donné par Trump au Pentagone pour la reprise des essais nucléaires, l’ont clairement démontré. La compétition stratégique et la profonde méfiance entre les États-Unis et la Chine demeurent les principaux moteurs de cette rivalité.

La rencontre Trump-Xi à Busan a atteint son objectif minimal : éviter une guerre commerciale ouverte. Elle a offert aux deux plus grandes économies mondiales une trêve d’un an pour se concentrer sur la résolution de leurs problèmes internes les plus urgents. Washington et Pékin ont certes gagné du temps, mais le compte à rebours des désaccords structurels non résolus continue.

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