Nourrir l'esprit d'entreprise

Ligne de production de composants électroniques de la société par actions Sun Tech, située dans le parc industriel de Thanh Van, province de Bac Giang. Photo : DANH LAM

Aujourd'hui, l'histoire met une fois de plus en lumière le rôle crucial des entreprises et des entrepreneurs dans la construction d'un Vietnam prospère d'ici 2045, d'autant plus que la pandémie de Covid-19 a affecté la croissance rapide de l'économie vietnamienne et retardé les progrès du développement économique mondial.

Après une année de levée progressive des mesures de distanciation sociale et de retour à une nouvelle normalité, l'économie vietnamienne a enregistré une hausse encourageante de son produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre, de 13,67 %. Ce chiffre porte la croissance du PIB sur les neuf premiers mois de l'année à 8,83 %, son niveau le plus élevé depuis 2011 et constitue un signe positif pour la croissance régionale et mondiale. Cela indique que l'économie vietnamienne renoue avec une forte croissance.

Pas seulement rose

Malgré des difficultés sans précédent dues à l'impact négatif de la pandémie, un nombre record de nouvelles entreprises a été enregistré, témoignant des efforts et de l'esprit d'entreprise du monde des affaires, et montrant que même en période difficile, de nombreuses opportunités commerciales se présentent.

À ce jour, bien que l'objectif d'un million d'entreprises n'ait pas été atteint, le pays compte près de 900 000 entreprises en activité, dont 124 entreprises et 283 produits sont des marques nationales. Le tissu entrepreneurial s'élève à 4 millions d'entrepreneurs, parmi lesquels 7 figurent parmi les milliardaires mondiaux en dollars américains.

Cependant, le tableau économique n'est pas entièrement idyllique. L'analyse de données pluriannuelles révèle des problèmes préoccupants concernant le développement des entreprises. Selon le rapport spécial de la Chambre de commerce et d'industrie du Vietnam (VCCI) sur le développement des entreprises pour la période 2011-2020, en moyenne, 103 529 nouvelles entreprises ont été créées chaque année, tandis que 76 140 ont quitté le marché.

Le taux de croissance moyen des entreprises nouvellement créées n'est que de 6,35 %, inférieur à celui des entreprises retirées du marché (7,29 %). Ce taux tend à diminuer malgré les efforts déployés par le Vietnam pour améliorer son environnement des affaires et maintenir sa stabilité macroéconomique. La forte augmentation du nombre de faillites entre 2010 et 2020 montre également que la politique privilégie le développement quantitatif au détriment du développement qualitatif des entreprises.

Le nombre de faillites et de suspensions d'activité est anormalement élevé ; il ne s'agit plus d'une « purification », mais d'un dépassement des règles d'élimination du marché.

Les experts économiques affirment que le nombre d'entreprises en faillite ou inactives est anormalement élevé ; il ne s'agit plus d'un simple « assainissement », mais d'un phénomène qui dépasse les limites de l'élimination naturelle par le marché. Par conséquent, une analyse approfondie est nécessaire pour élaborer des politiques de développement des entreprises adaptées aux besoins futurs.

Si l'on prend en compte l'ensemble des entreprises qui quittent le marché, telles qu'elles apparaissent dans le rapport d'immatriculation des entreprises, le tableau d'ensemble est clairement préoccupant. Or, au regard de la situation économique, il est essentiel de considérer les entreprises, car elles en sont les acteurs principaux. Le professeur agrégé Tran Dinh Thien, ancien directeur de l'Institut économique du Vietnam, a déclaré : « 70 % des entreprises doivent quitter le marché après une durée de vie moyenne d'à peine 4 à 5 ans. Ce processus d'exploitation est quasiment improductif et représente un gaspillage considérable de ressources pour la société. Quant aux 30 % restantes, elles mettent entre 30 et 40 ans à atteindre le marché mondial, en raison de leur faible point de départ, de leurs capitaux limités et de leurs effectifs réduits. »

Crainte d'une baisse de la motivation des entreprises

La principale préoccupation actuelle concerne l'entrepreneuriat. Le ralentissement des réformes de l'environnement des affaires, la crainte de commettre des erreurs et d'être tenu responsable par les organismes de réglementation, ainsi que la superposition des réglementations, freinent la motivation des entrepreneurs et des entreprises. Un rapport du ministère du Plan et de l'Investissement indique qu'au cours des cinq dernières années, très peu de nouveaux projets et travaux ont été lancés par les entreprises publiques. La plupart se contentent de mener à bien des projets inachevés ou de rattraper le retard accumulé.

Le Dr Nguyen Dinh Cung s'inquiète des obstacles sans précédent auxquels le monde des affaires est confronté depuis la mise en œuvre de la loi sur les entreprises de 2000. Auparavant, chaque secteur gérait ses propres affaires, mais on constate depuis peu une recrudescence des cas de déresponsabilisation, les fonctionnaires craignant de commettre des erreurs, rechignant ou n'osant pas assumer pleinement leurs fonctions. Ministères et secteurs envoient des dépêches officielles pour consulter l'ensemble des organismes et tenter de parvenir à un consensus. Or, bien souvent, ils ne reçoivent que des réponses vagues et les délais sont indéfiniment repoussés sans qu'une décision définitive ne soit prise.

La construction de la première phase du terminal passagers de Long Thanh est également bloquée dans cette situation. M. Lai Xuan Thanh, président de la Société des aéroports du Vietnam (ACV), a déclaré que, par rapport aux plans initiaux approuvés par la décision n° 1777/QD-TTg, les documents techniques ont été modifiés sur certains points : la hauteur du terminal passagers est passée de 45 m à 45,55 m et la surface utile de 373 000 m² à 376 000 m².

Ces ajustements sont tout à fait normaux dans le secteur de la construction. Ils permettent d'optimiser les travaux, de garantir leur efficacité et de préserver le périmètre, la fonction et l'envergure de la station. En pratique, chaque projet de construction présente ses propres aléas. Face à une difficulté, nous nous efforçons de trouver des solutions innovantes pour assurer le bon déroulement du projet. « Cela devrait être un facteur de motivation plus important pour les grands projets nationaux, mais j'ai le sentiment que cette motivation est en baisse », a déclaré M. Lai Xuan Thanh.

Ces obstacles invisibles expliquent également la lenteur de la mise en œuvre du Programme de relance et de développement économique du gouvernement : seuls 61 000 milliards de dongs ont été déboursés sur un total de près de 350 000 milliards. Le Dr Nguyen Dinh Cung craint que les conséquences de ce manque de motivation soient incommensurables, car la capacité de production et le potentiel de croissance à moyen et long terme de l’économie pourraient s’en trouver réduits.

Cultiver l'esprit d'entreprise au service des autres

L'esprit d'entreprise des entrepreneurs vietnamiens est très fort, mais les conditions nécessaires à l'épanouissement, à la promotion et au développement de leurs idées sur le marché font défaut. C'est pourquoi les startups peinent encore à devenir des licornes, tandis que la transformation des micro-entreprises en entreprises de taille moyenne est trop longue, et que les entreprises ne peuvent ou ne souhaitent pas croître. Il est essentiel de prendre en compte cette problématique lorsqu'on envisage l'avenir du développement des entreprises et des entrepreneurs vietnamiens.

Le bilan de dix années de mise en œuvre de la résolution 09-NQ/TW du Politburo sur le renforcement et la promotion du rôle des entrepreneurs vietnamiens dans la période d'accélération de l'industrialisation, de la modernisation et de l'intégration internationale montre que les périodes les plus difficiles sont aussi celles où des entreprises pesant des milliards de dollars comme Vietjet, TH True Milk, Vingroup et Thaco prennent de nouvelles mesures pour se développer.

C’était le début de la période 2010-2020, une période marquée par une forte instabilité de la macroéconomie vietnamienne due à la récession économique mondiale, aggravée par des difficultés internes persistantes. Parallèlement, le développement du tissu économique vietnamien, objectif fixé par la résolution du XIIIe Congrès national du Parti, constituait un moment historique, alors que le monde des affaires émergeait à peine de la pandémie de Covid-19. De cette période particulièrement difficile naîtra une nouvelle génération d’entreprises, composée notamment des leaders historiques et d’une nouvelle génération d’entrepreneurs animés par la passion, la volonté et les aspirations de leur époque.

M. Vu Tien Loc, président du Centre d'arbitrage international du Vietnam, a qualifié cette génération d'hommes d'affaires au service du pays, ceux qui placent les intérêts de la nation et du pays au-dessus de tout, et qui partagent de manière responsable leurs responsabilités envers la société et le pays pendant la pandémie et les difficultés liées aux modèles de développement, à la restructuration et aux objectifs de développement durable de l'économie.

« Le plus important à l'heure actuelle est d'encourager et de préserver l'esprit d'entreprise en instaurant un environnement commercial sain et transparent, afin de motiver les entreprises publiques à se développer et les entreprises privées à exercer leurs activités en toute sérénité et à transmettre leur héritage à leurs successeurs. Je suis convaincu qu'en déployant tous nos efforts, notre détermination et notre créativité, nous atteindrons nos objectifs, tout comme le gouvernement a su trouver rapidement des vaccins lors de la pandémie de Covid-19 », espère M. Dau Anh Tuan, directeur du département juridique de la VCCI.

Le plus important à présent est d'encourager et de maintenir l'esprit d'entreprise en véhiculant le message du rétablissement d'un environnement commercial sain et transparent.

Le Dr Nguyen Dinh Cung souhaite que le gouvernement trouve d'urgence la motivation nécessaire pour réformer et améliorer l'environnement des affaires afin de redresser l'économie et de parvenir à une croissance durable, notamment en « dissipant la peur » de commettre des erreurs parmi les fonctionnaires et les chefs d'entreprise.

Le Vietnam a traversé une période extrêmement difficile pour son économie et ses entreprises. Face à ce déclin, il est essentiel de puiser une nouvelle énergie pour préparer la prochaine phase de croissance et rattraper le retard de développement causé par la pandémie de Covid-19. Du côté des entreprises, cette nouvelle énergie se traduit par la volonté de surmonter les difficultés, d'innover et d'accepter les risques pour atteindre l'objectif final ; du côté du gouvernement, elle repose sur la détermination à tenir son engagement d'accompagnement, en plaçant les citoyens et les entreprises au cœur de ses priorités.