Le président Donald Trump en visite en Asie : quand le commerce rencontre le pouvoir
Hier (26 octobre), Air Force One a quitté les États-Unis, marquant le premier voyage du président américain Donald Trump en Asie depuis le début de son second mandat. Ce périple d'une semaine à travers la Malaisie, le Japon et la Corée du Sud est considéré par les observateurs comme un test important de la stratégie « L'Amérique d'abord » de Donald Trump, une stratégie qui allie diplomatie ferme et pragmatisme économique.
La position dominante du commerce
La première étape du voyage de Trump fut Kuala Lumpur, où il assista à la signature d'un accord de paix entre le Cambodge et la Thaïlande. Cet événement fut présenté par la Maison Blanche comme un « succès diplomatique typiquement trumpien » : la paix et le commerce, à l'image de la stratégie employée par Donald Trump dans de nombreux autres points chauds, tels que le conflit ukrainien ou la bande de Gaza. Le président américain avait déclaré qu'il « ne signerait aucun accord commercial avec les belligérants », contraignant ainsi les deux pays à la table des négociations. Le fait que la cérémonie de signature se soit tenue dès son arrivée en Malaisie revêtait une importance symbolique, mais a également permis à Washington d'affirmer son rôle de médiateur dans une région fortement influencée par Pékin.

Après la cérémonie de signature, Donald Trump rencontrera le Premier ministre malaisien Anwar Ibrahim et assistera à un banquet de travail pour les dirigeants de l'ASEAN. La Malaisie, qui assure la présidence tournante du bloc, a choisi pour thème du sommet « Inclusion et durabilité », un thème que Donald Trump a rapidement résumé en ces termes : « L'inclusion, c'est quand tout le monde y gagne, et la durabilité, c'est quand l'Amérique n'est plus pénalisée sur le plan commercial. » À Kuala Lumpur, Donald Trump devrait annoncer une série d'accords commerciaux bilatéraux, notamment sur les minéraux stratégiques et la technologie des semi-conducteurs, deux piliers de la réindustrialisation américaine.
De Malaisie, M. Donald Trump se rendra au Japon. Au Japon, il a été chaleureusement accueilli par la Première ministre Sanae Takaichi, première femme à occuper ce poste. Sous l'impulsion de Mme Takaichi, conservatrice profondément influencée par l'ancien Premier ministre Shinzo Abe, Tokyo ambitionne de porter les dépenses de défense à 2 % du PIB d'ici 2027, soit deux ans plus tôt que prévu. Cette mesure devrait ravir Donald Trump, qui a toujours exhorté ses alliés à « payer leur juste part » pour la sécurité régionale. Outre la défense, les deux parties ont abordé les questions commerciales. Donald Trump souhaite renégocier l'accord nippo-américain signé en juillet, notamment les dispositions relatives aux produits agricoles, aux technologies et à la production de semi-conducteurs. De son côté, Mme Takaichi s'est engagée à investir 550 milliards de dollars dans l'économie américaine, dans le cadre d'une stratégie visant à renforcer la coopération économique bilatérale.

Le point d'orgue de ce voyage sera la Corée du Sud, où le président Donald Trump devrait participer au sommet de l'APEC et rencontrer en tête-à-tête le président chinois Xi Jinping. Ce sera la première fois que les deux dirigeants s'entretiendront depuis le retour de Trump à la Maison Blanche. Cette visite intervient dans un contexte de nouvelles tensions entre les États-Unis et la Chine, suite à l'extension par Pékin de ses restrictions à l'exportation de terres rares, matériaux essentiels pour l'industrie de défense américaine. En réponse, Washington a annoncé l'imposition d'une taxe de 100 % sur les produits chinois à compter du 1er novembre en l'absence d'accord. Par conséquent, la rencontre entre Donald Trump et Xi Jinping est considérée comme la dernière chance d'éviter une « seconde guerre commerciale d'envergure ».
Dans le même temps, le président américain a également évoqué la possibilité d'une rencontre avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un, bien que la Maison Blanche ne l'ait pas confirmée. Si les diplomates estiment cette éventualité peu probable, le fait que Donald Trump ait de nouveau abordé le sujet de la Corée du Nord montre qu'il considère toujours la péninsule coréenne comme un enjeu stratégique lui permettant d'affirmer son rôle de médiateur.
Djuge-lieu de pouvoir
Bien plus qu'une simple quête d'accords économiques, le voyage de Donald Trump reflète sa vision « transactionnelle » du pouvoir en matière de politique étrangère. Chaque étape – de Kuala Lumpur à Tokyo en passant par Séoul – est une table de négociation où le commerce est instrumentalisé pour asseoir son influence politique. L'organisation par Donald Trump de la signature d'un accord de paix entre le Cambodge et la Thaïlande est un événement rare : un président américain se mue en médiateur dans un conflit en Asie du Sud-Est. Mais derrière ce message de « paix » se cache une stratégie visant à renforcer la position des États-Unis par la pression économique. Le Cambodge et la Thaïlande sont tous deux fortement dépendants du commerce avec les États-Unis, et la menace de « bloquer l'accord si le conflit persiste » a permis une désescalade rapide.
Bien que la paix soit au cœur du message, le commerce constitue le fil conducteur du voyage de Donald Trump. Des accords informels en Asie du Sud-Est aux négociations complexes avec le Japon et la Corée du Sud, les États-Unis poursuivent un objectif unique : protéger la production et l’emploi nationaux. Face aux choix difficiles auxquels sont confrontés les pays asiatiques suite à l’imposition par les États-Unis de nouvelles règles d’origine visant à empêcher la Chine d’utiliser des pays intermédiaires pour contourner les droits de douane, Donald Trump chercherait à remodeler l’ordre commercial régional dans le sens le plus favorable aux États-Unis. Les accords bilatéraux qu’il privilégie ne sont peut-être pas aussi complets que les accords multilatéraux, mais ils offrent à Washington une plus grande marge de manœuvre pour appliquer des politiques de « droits de douane de levier ».

Lors de ce voyage, la rencontre attendue entre le président Donald Trump et le président Xi Jinping à Busan est suivie de près par la communauté internationale. Bien que la Chine ne l'ait pas encore confirmée officiellement, des équipes de négociation bilatérales sont présentes en Malaisie depuis le week-end pour préparer la rencontre. Dès les premières heures de son arrivée, le message de Donald Trump était clair : ce déplacement vise à renforcer l'intérêt économique des États-Unis. À bord d'Air Force One, le président a affirmé à la presse être « prêt à subventionner les agriculteurs américains si aucun accord n'est trouvé avec la Chine », tout en annonçant qu'il discuterait avec le président Xi Jinping d'un « accord global » susceptible d'apaiser temporairement les tensions commerciales entre les deux plus grandes économies mondiales. Les deux dirigeants devraient aborder les négociations avec leurs propres objectifs. Donald Trump a besoin d'une victoire diplomatique pour prouver l'efficacité de sa politique tarifaire, tandis que Xi Jinping souhaite préserver la stabilité commerciale dans un contexte de ralentissement économique en Chine. On espère que les deux parties parviendront à un accord temporaire, prolongeant ainsi la trêve commerciale et ouvrant la voie à la prochaine phase des négociations. D'autres sujets sensibles – de la question de Taïwan (Chine) à l'achat de pétrole russe, en passant par le trafic de précurseurs du fentanyl – seront également abordés. Bien que les analystes estiment qu'il ne faut pas avoir d'attentes trop élevées quant à cette rencontre, les deux camps conservant une position intransigeante, pour Donald Trump, l'image d'une confrontation avec Xi Jinping dans un contexte économique mondial instable suffit à réaffirmer son message : l'Amérique reste au cœur des grandes décisions.
La tournée asiatique du président Donald Trump, bien qu'encore à ses débuts, a révélé une stratégie de politique étrangère directe privilégiant les négociations bilatérales et une volonté d'utiliser les avantages économiques pour atteindre des objectifs politiques. De la réconciliation entre le Cambodge et la Thaïlande aux négociations avec le président chinois Xi Jinping, des pressions exercées sur les alliés pour qu'ils augmentent leurs dépenses de défense aux promesses d'investissements aux États-Unis, Donald Trump se forge l'image d'un « président homme d'affaires » qui façonne l'ordre établi par le biais de contrats et d'accords.


