Visite du président Macron en Chine : perspectives d’ouverture d’un « chapitre asiatique »
Emmanuel Macron arrivera à Xi'an, en Chine, le 8 janvier pour entamer sa première tournée asiatique en tant que président français.
Un début prometteur
Pour le président français Emmanuel Macron, sa visite en Chine du 8 au 10 janvier a marqué de nombreuses « premières ».
Le président français Emmanuel Macron. Photo : AP |
Il s'agit du premier déplacement à l'étranger de M. Macron en 2018, de son premier voyage en Asie en tant que président de la France et également de sa première visite en Chine, première puissance économique d'Asie et partenaire important de premier plan de la France et de l'Union européenne.
Toutes ces « premières » font de ce voyage un acte officiel d’ouverture du « chapitre asiatique » de la politique étrangère de la France sous M. Macron.
À sa prise de fonctions en mai 2017, M. Macron a concentré ses efforts diplomatiques principalement sur l'Europe. Dans les derniers mois de 2017, ce fut le tour de l'Afrique et du Moyen-Orient.
L’Asie est une région où un jeune président comme M. Macron, qui a connu un grand succès en matière de politique étrangère, n’a pas encore déclaré ou mis en œuvre de stratégie spécifique.
Le voyage en Chine révélera donc les premiers signes de la manière dont la France aborde la Chine en particulier et la région asiatique en général.
C’est d’autant plus remarquable que la Chine est non seulement un partenaire extrêmement important pour la France et l’Europe, mais aussi parce que pendant la campagne électorale ainsi que lorsqu’il est devenu président de la France, M. Macron a toujours mis l’accent sur la Chine comme un rival stratégique de l’Union européenne.
En fait, M. Macron a toujours utilisé la concurrence avec la Chine comme levier pour promouvoir les projets de réforme de l’Union européenne.
Les observateurs européens sont donc très intéressés de voir comment, des paroles aux actes, le jeune président français gérera la relation avec un partenaire de plus en plus « obsédé » par l’Europe.
Car ce n’est certainement pas un hasard si M. Macron a choisi la Chine comme premier pays asiatique à visiter, au lieu des partenaires plus importants et « confortables » de la France en Asie comme le Japon ou l’Inde.
« La Route » et Obsession
La Chine est un partenaire économique important de l'Union européenne, représentant 15 % du chiffre d'affaires total du bloc. Pour la France, la Chine est également le premier partenaire commercial en Asie.
C’est pourquoi M. Macron est accompagné dans ce voyage en Chine par les plus grandes entreprises françaises des secteurs de l’aéronautique, de l’agroalimentaire, de l’énergie et des infrastructures.
Une multitude de contrats a été évoquée par la presse française avant le voyage. On s'attend à ce que des entreprises chinoises et françaises signent une cinquantaine de contrats économiques à cette occasion, notamment la vente de 100 avions par Airbus à une compagnie aérienne chinoise.
Cependant, dans les relations économiques avec la Chine, la plus grande préoccupation de la France réside dans un autre aspect, le déficit commercial et la capacité des entreprises françaises à accéder au marché chinois.
La France souffre actuellement d’un énorme déficit commercial avec la Chine, qui s’élève à environ 30 milliards d’euros l’an dernier.
Il s'agit du plus important déficit commercial de la France avec un partenaire économique au monde et il devrait continuer à augmenter.
Au fil des années, les gouvernements français successifs ont fait du rétablissement de l'équilibre des échanges commerciaux une priorité absolue dans les relations économiques avec la Chine, en appelant la Chine à mettre en œuvre le principe du « donnant-donnant » et à ouvrir plus fortement son marché aux entreprises françaises.
C’est aussi ce que M. Macron tentera de transmettre à M. Xi à Pékin.
Mais il y a aussi d’autres sujets importants à discuter.
La visite de M. Macron à Xi'an, point de départ de l'ancienne « Route de la Soie » reliant l'Est et l'Ouest, est porteuse d'un message clair.
Récemment, le projet de grande envergure chinois « Une route, une ceinture » visant à recréer la Route de la soie dans la nouvelle ère a suscité à la fois l’attention et l’inquiétude des pays européens.
Les bénéfices économiques sont prometteurs, mais les défis culturels, de gouvernance et même géopolitiques sont également de grandes questions pour les pays européens, en particulier pour un pays qui veut toujours maintenir sa position de puissance régionale comme la France.
Le problème de la France avec le méga-projet chinois, tel qu'analysé par les universitaires français, est de déterminer où la France se situera et jouera le rôle d'un partenaire clé ou simplement celui de terminus d'un train transcontinental s'étendant de Xi'an à Lyon ?
Et enfin, M. Macron a également dû évoquer avec les dirigeants chinois une autre préoccupation très « européenne » : les investissements chinois en Europe et vice-versa.
Au cours des dernières années, les investissements chinois sur le vieux continent ont augmenté de plusieurs dizaines de pour cent chaque année, jusqu’à 77 pour cent en 2016. Au contraire, les investissements de l’UE en Chine ont diminué chaque année, en baisse de 23 pour cent en 2017.
Mais la plus grande inquiétude ne réside pas dans les chiffres, mais dans leur évolution : l’Europe s’inquiète de voir la Chine investir massivement dans les industries de pointe de ses pays.
En 2017, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a évoqué la nécessité d’introduire des lois restreignant les investissements étrangers, avec une référence claire à la Chine, dans les industries européennes clés, craignant une perte de technologie et des atteintes aux intérêts nationaux.
M. Macron lui-même a d’ailleurs évoqué la même chose dans son discours sur la vision future de l’Union européenne fin septembre 2017.
La question est maintenant de savoir comment M. Macron va en parler avec les dirigeants chinois.