Message du plan de contrôle technologique de la Chine

« Réciproquement »

La technologie est au cœur de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine. Après les sanctions imposées par les États-Unis au géant technologique chinois Huawei en mai 2019, Pékin n'a toujours pas pris de mesures de rétorsion fortes.

Cependant, de nombreuses options ont été envisagées par ce pays, notamment dans le cadre du perfectionnement de ses politiques.

Il y a plus d’une semaine, les autorités chinoises ont annoncé qu’elles créeraient une liste d’entreprises étrangères « peu fiables » en représailles à la décision américaine d’inscrire le géant chinois des télécommunications Huawei et 68 autres entités sur une « liste noire » qui leur interdit d’acheter des pièces et des technologies auprès d’entreprises américaines.

La Chine étudie la mise en place d'un mécanisme de « gestion de la sécurité technologique nationale » en réponse à l'interdiction américaine visant Huawei. Photo : WSJ

Plus récemment, la Commission nationale du développement et de la réforme de la Chine a annoncé qu'elle étudiait la mise en place d'un mécanisme de « Liste nationale de gestion de la sécurité technologique », une forme de contrôle technologique.

Selon les médias chinois, le contrôle technologique vise à prévenir et à limiter les risques liés à la sécurité nationale, de la même manière qu'il s'agit d'établir un « pare-feu » pour protéger la sécurité économique et technique, ainsi que les technologies de base dans lesquelles la Chine a réussi, comme l'aérospatiale, les équipements ferroviaires à grande vitesse, les paiements électroniques par appareils mobiles, la 5G ou la technologie de production de terres rares.

La Chine considère désormais les terres rares comme l’une des « armes » qui pourraient être lancées en représailles contre les États-Unis.

Le minerai est utilisé comme intrant dans une large gamme de produits de consommation, des iPhones aux voitures électriques, ainsi que dans les moteurs à réaction, les satellites et les lasers qui sont très demandés par les entreprises américaines.

Bien que les terres rares soient présentes dans de nombreuses régions du monde, très peu de pays les exploitent ou les produisent. La Chine, quant à elle, domine l'industrie minière des terres rares, fournissant plus de 70 % de la production mondiale.

Aux États-Unis seulement, environ 80 % des importations de terres rares proviennent de Chine. Bien que l'Estonie, la France et le Japon fournissent également des terres rares traitées aux États-Unis, le minerai principal provient toujours de Chine. Dans une récente déclaration, le gouvernement chinois a laissé ouverte la possibilité de restreindre l'approvisionnement des États-Unis en terres rares.

Une fois le mécanisme de « Liste nationale de gestion de la sécurité technologique » mis en place, la Chine devrait immédiatement restreindre ses exportations de terres rares vers les États-Unis. De plus, Pékin pourrait bloquer l'accès à son marché aux technologies américaines non désirées.

Si l'on examine la manière dont la Chine envisage de réagir face aux États-Unis, on constate qu'elle tente de riposter de la même manière que Washington. Autrement dit, la Chine souhaite affronter les États-Unis en combat singulier : partout où Washington « frappe », Pékin riposte.

La Chine fournit plus de 70 % de la production mondiale de terres rares. Photo : AP

Le « rêve » de la Chine

Le « rêve » de devenir la première puissance technologique mondiale est quelque chose que la Chine ne cache pas, notamment dans le Plan Made in China 2025.

Le message du plan chinois visant à établir un mécanisme de « gestion de la sécurité technologique nationale » n’est pas simplement une réponse aux États-Unis, mais plus profondément, c’est une affirmation que la Chine sera autosuffisante en technologie pour créer une position « égale » dans la compétition avec les États-Unis.

Actuellement, le pays reste fortement dépendant des technologies étrangères et ne peut produire seul les technologies essentielles. Les puces électroniques, technologie de base de tout, des smartphones aux voitures, en sont un exemple typique.

La Chine dépend actuellement fortement des fabricants de puces électroniques étrangers, ayant investi des dizaines de milliards de dollars dans plusieurs entreprises nationales au cours des dernières années dans l’espoir de produire ses propres puces plutôt que d’utiliser une technologie étrangère.

Malgré les subventions gouvernementales, la Chine a encore un long chemin à parcourir avant de devenir véritablement une puissance technologique de premier plan, selon certains experts.

Ce n'est pas seulement que la Chine a démarré plus tard, mais surtout qu'elle adopte la technologie plutôt que de partir de zéro. Nombre des réussites technologiques du pays au fil des ans ont suivi une formule combinant technologie occidentale et modèle économique innovant pour créer un boom.

Des ouvriers inspectent un bras robotisé dans une usine de Nanning, dans l'est de la Chine. Photo : AP

Depuis que les États-Unis ont imposé des sanctions à ZTE, la deuxième plus grande entreprise de télécommunications chinoise, l'année dernière, et les « coups » successifs portés à Huawei cette année, Pékin semble avoir compris que l'autonomie technologique est un moyen de « négocier » contre les défis extérieurs.

Un article récent de Bloomberg affirmait que la « guerre froide » avait commencé dans le secteur technologique. La Chine n'a d'autre choix que de rechercher son indépendance technologique et elle dépensera beaucoup d'argent pour y parvenir. Elle s'efforcera de créer son propre système d'exploitation pour smartphones, sa propre technologie de semi-conducteurs et ses propres normes technologiques.

La situation actuelle de la Chine est similaire à celle des États-Unis il y a plus de 60 ans, lorsque l'Union soviétique a lancé le satellite Spoutnik en orbite terrestre, ouvrant l'ère de la conquête spatiale en 1957, choquant les États-Unis et les forçant à investir financièrement dans la recherche sur les nouvelles technologies spatiales.

Dans cette compétition technologique, il sera difficile pour les États-Unis et la Chine de coexister pacifiquement. La concurrence et les conflits entre les deux parties vont certainement s'intensifier.

Le monde pourrait s'engager sur la voie de deux « systèmes technologiques » distincts, la Chine « évinçant » les entreprises américaines et les États-Unis « évinçant » les entreprises chinoises. Autrement dit, les technologies des deux parties suivraient des chemins différents.