L'étagère de méditation

J'ai un ami qui n'est pas très idéaliste, mais l'autre jour, quand je suis venu lui rendre visite, il peinait à construire un autel. J'ai été surpris, puis mon ami m'a expliqué :

- Ce n'est pas un autel, c'est l'autel ancestral de mes parents. Je ne vénère ni dieux ni Bouddhas. Imaginez une étagère de méditation !

Il vaudrait mieux ne pas donner d'explications, mais plus j'explique, plus je me sens confus. Pourquoi n'y a-t-il personne vénéré sur l'autel ? N'est-ce pas un blasphème ? Les gens ne vénèrent-ils pas leurs ancêtres ou leurs dieux que pour témoigner leur respect, pour être protégés du malheur et pour recevoir de bonnes choses ?

- Je ne pense pas. La chance et la fortune qui nous arrivent dans la vie ne nous sont pas données par des dieux ou des ancêtres, mais sont le fruit de notre propre vision de la vie, créée par nous-mêmes.

Mon ami perçait des trous dans le mur pour installer une « étagère de méditation » et a répondu calmement.

On dit souvent « Si le père mange salé, le fils aura soif », car la relation de cause à effet se transmet de génération en génération. Si les parents font de mauvaises choses, les enfants en subiront les conséquences, autrement dit, le « karma ». Ou inversement, « Un arbre vert a des feuilles vertes, un parent bienveillant laisse de la vertu à ses enfants » signifie que des parents bien portants laisseront des fruits sucrés à leurs enfants plus tard. En général, ces points de vue semblent exacts, mais en réalité, nous méconnaissons la nature du problème. L'affirmation « Si le père mange salé, le fils aura soif » signifie en réalité que si le père mange salé, le fils mangera également salé, et que la soif est due au fait que nous mangeons nous-mêmes salé. La relation de cause à effet est réelle, mais nous avons identifié la cause erronée qui mène au résultat immédiat. Chaque personne a son propre karma. Les malheurs ou les bonnes fortunes qui nous arrivent dans cette vie limitée sont le résultat d'une série d'actions qui reflètent notre philosophie de vie passée, présente et future. Une vision correcte de la vie portera ses fruits, tandis qu'une vision déformée portera ses fruits amers. La vision des enfants est souvent influencée, contrôlée et héritée de celle de leurs parents. Il n'est donc pas faux de dire que les parents transmettent la vertu à leurs enfants, mais il s'agit d'une cause indirecte, et non directe comme on le pense.

Ça paraît raisonnable ! Mais je me demande quel est le rapport avec le fait que mon ami ait soudainement installé un autel, oh non, une « étagère pour se calmer » ?

Un autel, c'est bien, une étagère de méditation, c'est bien. L'apparence est la même, mais le cœur de chacun est différent. Certains érigent un autel pour témoigner leur respect à leurs ancêtres et à leurs dieux. D'autres pour en tirer des bienfaits. Quant à moi, je ne vénère aucune entité, je « vénère » mon propre ego. On dit souvent que les lignes de la paume reflètent le destin. En ouvrant la main, on peut voir toute sa vie ; en la fermant, la vie n'est-elle pas toujours dans le creux de sa main ? Avoir ce coin, c'est se créer une habitude, un lien, une responsabilité. Avoir deux jours par mois pour se regarder en face, tout mettre de côté et se remettre en question. Car même la personne la plus déterminée oublie parfois son ego.

Je suis resté silencieux et je n'ai plus posé de questions, car j'attendais aussi une réponse pour moi-même.