En mobilisant jusqu’à 25 bombardiers lourds pour participer à une campagne d’attaque contre l’État islamique, Moscou démontre la puissance écrasante ainsi que la préparation au combat de l’armée russe.

Bombardier stratégique russe Tupolev Tu-160. Photo : Reuters

La Russie a annoncé hier que le crash de son avion de ligne dans la péninsule du Sinaï, en Égypte, à la fin du mois dernier, était d'origine terroriste. Une bombe artisanale d'une puissance destructrice équivalente à 1,5 kg de TNT a explosé sur l'Airbus A321 de la compagnie aérienne à bas prix Kogalymavia (Metrojet), tuant 224 personnes à bord, a déclaré Alexandre Bortnikov, directeur du Service fédéral de sécurité russe. L'incident avait été revendiqué par l'État islamique (EI). En réponse, le Kremlin a lancé le même jour la plus vaste campagne aérienne contre des cibles de l'EI en Syrie, selon National Interest.

Le ministère russe de la Défense a annoncé le lancement d'une série de missiles depuis les bombardiers stratégiques du pays, tels que les Tupolev Tu-22M3 Backfire, Tu-95MS Bear et Tu-160 Blackjack. Ces trois modèles peuvent parcourir des milliers de kilomètres et emporter plus de 20 tonnes d'armes et de munitions. Par ailleurs, des navires de guerre russes en Méditerranée ont également tiré des missiles de croisière sur Raqqa, le bastion de l'EI en Syrie.

Lors de la première vague d'attaques, plus de dix bombardiers Tu-22M3 ont attaqué en continu les positions contrôlées par l'EI dans les provinces de Raqqa et de Deir Ezzor. Ensuite, un escadron de bombardiers supersoniques Tu-160 et de bombardiers quadripropulseurs Tu-95MS Bear a lancé une salve de 34 missiles de croisière air-sol sur des bases rebelles à Alep et Idlib. Cette opération marquait la première participation au combat de nouveaux bombardiers stratégiques russes depuis de nombreuses années.

Les 25 bombardiers moscovites étaient également escortés de huit chasseurs Su-34 Fullback et de quatre chasseurs polyvalents Su-30SM. Les Su-34 Fullback ont ​​contribué à la destruction de deux stations-service et de 50 véhicules des extrémistes. Par conséquent, la capacité des terroristes à exporter illégalement du pétrole a été considérablement réduite, a indiqué le ministère russe de la Défense dans un communiqué.

Par ailleurs, le président russe Vladimir Poutine a également demandé au Moskva, un croiseur de classe Slava opérant en Méditerranée, de coordonner ses opérations avec les forces françaises dans la région. Cette initiative est un premier signe de rapprochement entre la Russie et certains pays occidentaux dans la lutte contre l'EI, même si le chemin à parcourir pour parvenir à une coopération concrète est encore long, selon les experts.

La France intensifie ses efforts pour lutter contre l'EI après que le groupe a mené une série de six attentats sanglants à Paris le 13 novembre, tuant au moins 129 personnes et en blessant plus de 300.

Le Charles De Gaulle, seul porte-avions nucléaire français, se dirigerait vers la région pour commencer à bombarder les bases de l'EI. Bien que le navire ne soit que la moitié d'un porte-avions de classe Nimitz ou Ford de l'US Navy, il est équipé d'une série d'avions de chasse ultramodernes, tels que le Rafale, le Super Étendard et l'avion de détection lointaine E-2C Hawkeye. De par sa conception, le Charles De Gaulle peut également emporter des avions de chasse plus gros, comme le Boeing F/A-18E/F Super Hornet.

Le chroniqueur du Daily Beast, David Axe, a décrit la dernière frappe préventive de Moscou contre l'EI comme « l'une des opérations aériennes les plus importantes et les plus complexes de l'histoire moderne », signalant que la Russie prévoit d'intensifier davantage ses frappes aériennes en Syrie et de relancer sa flotte de bombardiers lourds qui a été mise en veilleuse en raison du manque de financement.

La mobilisation de jusqu'à 25 bombardiers lourds pour une mission d'attaque est également considérée comme une initiative audacieuse par le Kremlin, alors que l'arsenal russe ne compte actuellement qu'environ 70 Backfire, 58 Bear et 13 Blackjack. L'ampleur impressionnante de la campagne montre également que la préparation au combat de Moscou s'est considérablement améliorée. Dans les années 1990 ou au début des années 2000, la Russie a dû cesser d'exploiter la plupart de ses avions de chasse, faute de pouvoir acheter du carburant et rémunérer ses pilotes.

« Lorsque 25 des avions de chasse les plus puissants du monde attaquent simultanément, c'est bien plus qu'une simple frappe aérienne. C'est un message adressé au monde entier », a commenté Axe.

En comparaison, les bombardiers américains en mission volent généralement seuls ou par deux, et volent très rarement en grand nombre comme l'a fait la Russie lors de la campagne d'hier.

Ivan Konovalov, directeur du Centre de recherche stratégique, a déclaré que la participation de bombardiers russes à des missions d'attaque contre des cibles de l'EI montre le grand potentiel de Moscou dans l'utilisation de différents types d'armes et de méthodes pour gérer les situations de combat, démontrant « la force et la flexibilité de l'armée russe » dans la lutte contre le terrorisme.

Selon VNE