Les destins misérables de Calais – pourquoi ?
(Baonghean) - Calais est récemment devenue le centre de l'attention médiatique, non seulement en France, mais aussi dans de nombreux autres pays européens, confrontés à la difficile crise migratoire. Le Royaume-Uni ne fait pas exception : après l'annonce que 100 enfants ont dû dormir dehors toute la nuit après que la France a décidé de « nettoyer » le camp de migrants de la Jungle, les observateurs britanniques ont déclaré que c'était le prix à payer pour la position ferme de la Première ministre Theresa May.
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Des enfants migrants dorment dehors après l'opération de déblaiement du camp de Calais. Photo : PA. |
Discussion et réalité
Selon le Guardian, la seule question qui préoccupe actuellement la fermeture chaotique du camp de Calais, qui a laissé de nombreux enfants seuls dormir dehors, est de savoir si elle est le résultat d'une incompétence ou d'une politique préméditée et réfléchie. Le 10 octobre, la ministre britannique de l'Intérieur, Amber Rudd, a rencontré son homologue français, Bernard Cazeneuve, pour finaliser le projet de fermeture du camp de migrants. Ils ont réaffirmé leur accord sur l'importance de protéger la sécurité de tous les enfants pendant l'opération de nettoyage de la jungle.
Il est toutefois peu probable qu'une discussion détaillée sur ce qui pourrait réellement se passer ait eu lieu. L'ambassadrice de France au Royaume-Uni, Sylvie Bermann, a révélé en début de semaine que le gouvernement britannique avait rejeté une demande de rapatriement de tous les enfants « non accompagnés » issus de la vague migratoire au Royaume-Uni avant de lancer une campagne pour la fermeture du camp.
« Nous avons demandé au gouvernement britannique de prendre en charge tous les enfants non accompagnés. Ils ont indiqué vouloir étudier les dossiers et vérifier si les enfants avaient de la famille au Royaume-Uni. Les Français ne pouvaient pas être informés de cette situation, nous avons donc transmis la liste au gouvernement britannique, qui doit maintenant s'en occuper », a-t-elle déclaré.
En conséquence, la plupart des enfants du camp de fortune ne figuraient pas parmi les 200 enfants amenés en Grande-Bretagne la semaine dernière. Ils ont été abandonnés sur place, en attendant d'être pris en charge, tandis que le camp était démoli autour d'eux.
Le seul plan qui semble avoir été mis en œuvre par les autorités est d'utiliser des conteneurs maritimes comme abris temporaires, protégeant les enfants de la pluie et du soleil, le temps que les « résidents » adultes plient bagage et partent. Certes, des centaines d'enfants sont ainsi pris en charge pour avoir un endroit où se reposer à la tombée de la nuit, sans trop se soucier des intempéries, des insectes, etc., mais plus de 100 enfants restent sans toit.
Accidentel ou intentionnel ?
Cette triste situation a suscité une vague de réactions de la part d'associations caritatives, de bénévoles présents sur le site et même de responsables politiques britanniques. Le ministère de l'Intérieur a affirmé ne pas être autorisé à opérer sur le sol français et a souligné avoir déjà proposé son aide pour assurer la sécurité des enfants lors de la démolition du camp.
Le communiqué ajoute que le ministre français de l'Intérieur, Cazeneuve, a donné à Mme Rudd un engagement spécifique selon lequel le gouvernement français continuerait à assumer la responsabilité de tous les enfants à Calais pendant l'opération - y compris ceux qui sont examinés en vue d'un éventuel transfert vers le Royaume-Uni.
Mais cette réponse quelque peu hâtive et tardive risque de ne pas satisfaire grand monde. Ces dernières semaines, associations caritatives et responsables politiques britanniques ont mis en garde à plusieurs reprises contre le risque que des enfants migrants se perdent et tombent entre les mains de trafiquants à mesure que leurs refuges disparaissent.
Le caractère « de dernière minute » et « de sauvetage » de la récente réponse du ministère de l’Intérieur britannique est encore plus mis en évidence lorsqu’on rappelle que ce n’est que le 14 octobre que le gouvernement britannique a fait une demande officielle aux autorités locales pour trouver un endroit où vivre pour les enfants migrants qui sont éligibles à la réinstallation en vertu d’une loi modifiée, qui prévoit la réinstallation au Royaume-Uni de 3 000 enfants sans-abri à travers l’Europe.
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La Première ministre britannique Theresa May a adopté une position ferme à l'égard des migrants à Calais. Photo : PA. |
Rappelons qu’il y a un an, la Première ministre britannique Theresa May avait clairement indiqué que ceux qui posaient le pied à Calais ne méritaient pas d’être considérés comme des migrants et avait annoncé une approche plus dure, selon laquelle seuls les migrants les plus « méritants » se verraient accorder une protection temporaire au Royaume-Uni.
Cette nouvelle politique a été présentée par James Brokenshire, alors secrétaire d’État à la Sécurité et à l’Immigration, au Parlement britannique en février, affirmant que le ministère de l’Intérieur serait « plus sévère » envers ceux qui pourraient d’abord demander l’asile dans un autre pays.
Ainsi, jusqu'à présent, Mme May a peut-être réussi à préserver la Grande-Bretagne de la plus grande crise migratoire depuis la Seconde Guerre mondiale, qui frappe le Vieux Continent. Cependant, ce pays se demande encore s'il doit accueillir quelques centaines d'enfants supplémentaires sur son territoire. L'image d'enfants migrants recroquevillés dehors à la tombée de la nuit n'est peut-être pas le fruit d'une intention délibérée, mais elle est clairement le résultat d'une politique délibérée.
Phu Binh
(Selon le Guardian)